Des mois avant l’entrée en vigueur du Digital Markets Act, Apple alertait sur le risque de faire exploser le piratage avec le sideloading (l’action d’installer manuellement une application sur un appareil). Un discours que les autorités européennes n’ont pas écouté, puisqu’elles ont décidé de contraindre Apple à ouvrir les iPhone et iPad européens aux concurrents de l’App Store. La marque a mis en place plusieurs garde-fous, sur lesquels l’Europe enquête, comme le fait de contrôler chaque application publiée en dehors de l’App Store pour des raisons de sécurité.
Malheureusement pour Apple, les développeurs d’applications pirates ont décidé de ne pas accepter cet encadrement strict. Le magasin AltStore, qui propose des émulateurs, des utilitaires et de la pornographie aujourd’hui, a lancé une fonction inattendue le 17 avril : un second magasin d’applications, à télécharger depuis le premier, capable d’installer n’importe quel logiciel cracké avec l’aide d’un ordinateur. Une ruse déjà connue des amateurs de piratage, mais qui devient grandement facilitée dans l’Union européenne.
Un magasin pour installer un magasin avec des applications pirates
Sur l’AltStore PAL, un magasin gratuit réservé à l’Union européenne, on trouve depuis le 17 avril une nouvelle application : AltStore Classic. Il s’agit d’un logiciel bien connu des amateurs de piratage, qui l’utilisaient déjà pour cracker des applications payantes sur iPhone. Son installation était jusque-là compliquée, puisqu’il fallait un ordinateur et un certificat développeur. En Europe, n’importe qui peut désormais installer l’AltStore Classic en quelques secondes.
Par défaut, l’AltStore Classic ne contient aucune application piratée. Il dispose de quelques exclusivités (comme un émulateur Wii ou PlayStation), mais ne met rien d’illégal en avant.
Comme avec Cydia (le magasin des iPhone jailbreakés), il faut trouver des sources sur des forums, et les ajouter, pour débloquer d’innombrables logiciels normalement interdits. Parmi eux : des versions crackées de Spotify, Deezer ou YouTube, des émulateurs de macOS ou d’iOS, des versions sans publicités des réseaux sociaux, des logiciels de streaming/P2P et des utilitaires pour jailbreaker son iPhone.
Comment Apple a-t-il pu laisser passer l’AltStore Classic ? Avec le DMA, Apple est forcé à autoriser l’installation d’applications en dehors de l’App Store, mais vérifie leur contenu, pour s’assurer qu’il n’y a rien d’illégal ou de dangereux. C’est pour cette raison qu’il est obligé valider des titres comme l’AltStore, l’Epic Games Store ou Fortnite, qui ne font rien de mal.
L’ambiguïté ici est que l’AltStore Classic dispose d’un mode caché pour le piratage, sur lequel Apple ne peut pas réellement agir. Apple ne peut pas bloquer un magasin parce qu’elle le suspecte d’être utilisé pour faire autre chose.
Il ne serait néanmoins pas surprenant qu’Apple révoque rapidement l’autorisation de l’AltStore Classic en Europe, pour bloquer son téléchargement depuis l’AltStore PAL. La marque entrerait alors dans un bras de fer délicat, avec des régulateurs européens qui pourraient lui reprocher cet « autoritarisme ».
Trouver des applications pirates est simple, mais les installer reste difficile
Si les applications pirates sont très nombreuses sur l’AltStore Classic, et que certaines jouent avec les fonctionnalités d’iOS (notamment pour améliorer l’émulation avec du code interdit par Apple), les installer demeure compliqué. L’AltStore Classic n’utilise pas le système d’installation mis en place par Apple dans l’Union européenne, mais utilise des certificats développeur pour faire tourner jusqu’à 3 logiciels simultanément pour une durée du 7 jours. Puisqu’Apple ne valide pas les contenus pirates, alors ils ne peuvent pas s’installer facilement.
Pour installer une application pirate sur un iPhone européen, un utilisateur pirate doit se connecter à son compte Apple pour récupérer un certificat développeur, enregistrer l’identifiant UDID de son appareil et faire tourner un logiciel sur son Mac et son PC, pour auto-renouveler le certificat tous les sept jours. Le piratage reste difficile en Europe, mais installer un magasin illégal prend quelques secondes. Le risque pour Apple est d’être contraint par l’UE à assouplir son dispositif, et donc à faciliter grandement l’installation de ces applications à l’avenir.
Vous avez lu 0 articles sur Numerama ce mois-ci
Tout le monde n'a pas les moyens de payer pour l'information.
C'est pourquoi nous maintenons notre journalisme ouvert à tous.
Mais si vous le pouvez,
voici trois bonnes raisons de soutenir notre travail :
- 1 Numerama+ contribue à offrir une expérience gratuite à tous les lecteurs de Numerama.
- 2 Vous profiterez d'une lecture sans publicité, de nombreuses fonctions avancées de lecture et des contenus exclusifs.
- 3 Aider Numerama dans sa mission : comprendre le présent pour anticiper l'avenir.
Si vous croyez en un web gratuit et à une information de qualité accessible au plus grand nombre, rejoignez Numerama+.
Toute l'actu tech en un clin d'œil
Ajoutez Numerama à votre écran d'accueil et restez connectés au futur !
Marre des réseaux sociaux ? Rejoignez la communauté Numerama sur WhatsApp !
