Le régime de Nicolas Maduro étend son contrôle sur les vénézuéliens grâce au développement d’une identité numérique pour chaque citoyen. La technologie supportant ce système d’identification est fournie par le Chinois ZTE.

La Chine ne partage pas le blocus des Américains quand il s’agit du Venezuela : pour fournir le pays en technologies, les géants de Shenzen dont ZTE, prennent avantageusement la place des entreprises nord-américaines. L’équipementier chinois est installé au cœur de Caracas dans un building qui raconte sa puissance locale. Aidée par la bienveillance de Beijing pour le régime de Nicolas Maduro, l’entreprise a largement investi ce marché si fermé. Smartphones, équipements, mais également solutions pour les administrations, ZTE est un précieux allié pour un pays déserté par les investissements.

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Stand ZTE au MWC 2016 Pierre Metivier

Cette amitié sino-vénézuélienne s’étend, selon une enquête fouillée de Reuters, à un large système d’identification numérique de la population orchestré par le gouvernement. Un tentaculaire réseau numérique de fichage qui inquiète des défenseurs des libertés publiques et qui a déjà subi une première attaque informatique couronnée de succès.

QR code d’identité

Introduit en décembre 2016 par le président Maduro, le système d’identification est assuré côté administration par l’enregistrement à travers des QR code unique d’un certain nombre d’informations sur le citoyen. Ces derniers portent une carte proposant ce même QR code qui est ensuite utile pour obtenir différents services : santé, aides humanitaires ou encore voter.

Dès le printemps 2017, le système, côté administration, est attaqué par un groupe de hackers nommé TeamHDP. Ces derniers, selon Reuters, se sont introduits dans la base de données géante produite par le gouvernement et hébergée au Mexique. Ils ont pu consulter les données récoltées et centralisées à travers cette carte : numéro de téléphone, email, adresse, participation aux événements du Parti Socialiste et possession d’un animal de compagnie sont quelques-unes des informations volées. La fuite de données a depuis été confirmée par les autorités vénézuéliennes.

Les premières critiques contre ce système seront formulées à l’occasion de sa mise en service controversée : le gouvernement a conditionné l’obtention de rations alimentaires à la participation des citoyens au système centralisé. Pour obtenir les aides alimentaires distribuées par l’armée (CLAP), les Vénézuéliens devaient accepter d’obtenir et utiliser la nouvelle carte d’identité. Ce type d’initiative a permis au régime de convaincre plus de 18 millions de citoyens de s’inscrire au programme.

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Caracas, Venezuela, 2008 Andreas Lehner

Lors des dernières votations, notamment le référendum controversé tenu par le régime, les possesseurs de cartes ont dû enregistrer leur mobilisation dans les bureaux de vote — et se sont vu remercier pour le geste individuellement. Selon des témoins, certaines autorités auraient entretenu le flou sur la possibilité pour les autorités de surveiller le vote des électeurs grâce au système. Il apparaît que cette fonctionnalité n’est pas déployée, mais Reuters parle d’un « effet refroidissant » auprès de la population.

Pour les observateurs, ce système numérisé, en outre d’être discutable pour la vie privée et d’une sécurité manifestement insuffisante, pourrait être une première pierre vers une entreprise de surveillance inspirée par les expérimentations politiques chinoises. ZTE, proche de Beijing, se montre un partenaire chaleureux pour le très isolé régime de Maduro. Aujourd’hui réfugié aux États-Unis, Anthony Daquin évoque le modèle du système de crédit social imaginé par Beijing avec ses bonus et malus en fonction du comportement de chaque citoyen.

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