Le 25 juin, Amazon a ajouté à son gigantesque empire un service qui lui manquait étonnamment jusqu’ici : une application de messagerie. La multinationale s’est offert Wickr Me, une entreprise vieille de presque 10 ans, qui a construit sa réputation sur la sécurité offerte aux utilisateurs. Moins connue que WhatsApp ou Signal, l’app propose cependant des options de sécurité plus avancées.
- Comme les deux apps populaires, ses communications sont chiffrées de bout en bout, mais avec un protocole différent, développé en interne. Ce standard de sécurité protège le contenu des messages dans le cas où ils seraient interceptés par un malfaiteur ou par les forces de l’ordre. De même, il empêche l’entreprise de lire les discussions de ses clients.
- Comme ses concurrentes, Wickr Me enlève les métadonnées de toute image partagée. Ces informations liées au fichier de l’image peuvent par exemple offrir des indications sur le lieu ou la date d’une photo.
- Les messages éphémères sont au centre du fonctionnement de l’application, avec la possibilité de les faire disparaître automatiquement au bout d’une temporalité choisie, et modifiable.
- Elle ne demande pas de lier obligatoirement son numéro de téléphone à l’app. Résultat : il est possible de donner à son interlocuteur un simple pseudonyme. C’est une garantie supplémentaire de protection de l’identité : les numéros de téléphone sont le plus souvent liés à une carte SIM, elle-même rattachée à un opérateur, et au nom réel de la personne. Plus généralement, il est possible d’utiliser Wickr sans communiquer la moindre donnée personnelle à l’application.
- Par défaut, l’app affiche un aperçu du site de destination d’un lien reçu, une protection relativement efficace contre le phishing.
Le montant de l’acquisition n’est pas connu, et pour l’instant, Amazon n’a pas commenté ses plans pour le futur de l’application. Dans son communiqué, Stephen Schmidtt, vice-président d’Amazon Web Services (AWS) et directeur de la sécurité de l’information insiste sur un point : « [Wickr] est une addition bienvenue à notre offre de services dédiés à la collaboration et à la productivité que AWS propose à ses clients et ses partenaires ».
Plus que l’application grand public, c’est donc la version « Pro » de Wickr Me qui semble intéresser Amazon. Dans cette version payante, l’application ressemble plutôt à un concurrent de Slack ou Microsoft Team, avec des canaux de discussions, des options de vidéoconférence ou encore du partage de fichier. Elle compte parmi ses clients des unités militaires, des agences gouvernementales ou encore des entreprises amenées à traiter des informations à haut niveau de sensibilité.
Wickr Me va-t-il changer sous Amazon ?
Les utilisateurs de Wickr Me ont de quoi se poser des questions sur le futur de leur application. Pour cause : le modèle économique d’Amazon semble diamétralement opposé aux valeurs de l’app. L’entreprise de Jeff Bezos s’est construite sur sa connaissance des consommateurs et de leurs comportements grâce aux données de ses différents services. À l’inverse, tout est fait sur Wickr pour récolter le moins d’informations, et Amazon n’a annoncé aucun changement.
Le parallèle de cette situation avec celle de WhatsApp, racheté par Facebook en 2014, paraît évident. Facebook a poursuivi l’impressionnante croissance du nombre d’utilisateurs de l’app, mais elle a en chemin perdu ses premiers utilisateurs. D’app utilisée par les personnes sensibles aux questions de sécurités (journalistes, activistes, criminels…) elle est devenue un classique des smartphones du grand public. Les premiers cités ont quant à eux migré sur Signal (comme les institutions européennes) ou d’autres apps « indépendantes ».
Difficile de ne pas imaginer une frange significative des actuels utilisateurs de la version gratuite de Wickr faire de même, et la quitter en raison de l’identité de l’acquéreur. Même si l’app a fait ses preuves, les plus ardents défenseurs de la vie privée n’utiliseront pas (ou plus dans ce cas) un service estampillé Gafa. Le récent exode des utilisateurs de WhatsApp vers Signal et Telegram à la faveur d’un simple changement de conditions d’utilisation était une nouvelle preuve, s’il en fallait, de la méfiance de plus en plus généralisée envers les géants de la tech.
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