Le journal britannique The Observer dresse cette semaine un portrait élogieux du ministre britannique de la propriété intellectuelle, David Lammy. Brillant avocat, plus jeune membre du gouvernement de Gordon Brown, ami personnel de Barack Obama, le ministre n’hésiterait pas d’après l’article à s’opposer aux lobbys industriels qui le poussent à adopter des lois toujours plus sévères pour le public.
« Un ministre plus faible aurait cédé sous le poids de l’intense lobbying des grosses multinationales titulaires de droits, mais Lammy a fait de son travail le fait d’écouter ceux qui n’ont pas des budgets de plusieurs millions de livres avec lesquels avancer leurs idées : les gens qui écoutent la musique ou regardent des films et la télévision« , écrit ainsi le journaliste Richard Wray.
Il a un avantage supplémentaire pour s’opposer : une certaine indépendance. En France, la régulation de la propriété intellectuelle est un domaine que se partagent le ministère de l’industrie, qui doit définir les règles relatives aux brevets ou aux marques commerciales en cotoyant tous les jours les grandes industries françaises qui en font usage, et le ministère de la culture, qui définit les règles du droit d’auteur en cotoyant tous les jours les créateurs et les producteurs qui en vivent. Le public, lui, a très peu de poids dans ces ministères et ne peut pas faire entendre son point de vue.
A l’écoute du peuple, David Lammy estime au contraire qu’il est nécessaire de changer les habitudes dans la manière d’aborder la propriété intellectuelle et de la réguler. Il veut davantage de pédagogie et de consultation, pour faire que les droits d’auteur soient mieux compris et acceptés par la population. C’est en quelque sorte un retour à l’idée du contrat social, qui a disparu avec la prise en main de ces questions par les lobbys au cours du 20ème siècle. « Je ne suis pas sûr qu’il y ait jamais eu un consensus depuis 1709 (année où le Statute of Ann a créé le droit d’auteur en Europe, ndlr) dans la famille du droit d’auteur« , dit-il, « mais il y a eu des moments critiques dans cette longue histoire : la naissance de l’imprimerie, la différence de perception entre l’Europe et nos collègues américains sur les droits des livres, même l’avènement de la télévision analogique a apporté son lot d’obstacles. Mais ce que nous voyons depuis trois ou quatre ans c’est une accélération massive du besoin de gérer cette nouvelle frontière. Ce que nous sommes prêts à faire en Grande-Bretagne c’est d’établir une vue mieux partagée de l’importance du droit d’auteur dans notre avenir créatif et économique« .
« Clairement la croissance d’internet a fourni les moyens de distribuer (les œuvres) d’une manière complètement différente, et c’est ce qui change la base de la discussion sur le droit d’auteur« , ajoute David Lammy.
Pas de riposte graduée en Grande-Bretagne
Selon le ministre britannique, qui a une vue très libérale de la propriété intellectuelle et estime que les solutions seront avant tout commerciales, il faut simplifier l’accès légal aux œuvres avant de chercher à faire respecter par la force les droits d’auteur. « Par le passé le droit d’auteur a été largement un domaine réservé aux avocats et aux créateurs, ou aux professionnels comme les enseignants. Nous allons vers un environnement où beaucoup de gens doivent savoir s’ils sont du bon côté de la loi, mais pour le moment l’accès à ces droits n’est pas un processus simple pour le consommateur« , constate-t-il.
A propos de la riposte graduée, « c’est aux Français de définir ce qui est juste pour eux, mais pour nous ici, nous ne pensons pas que c’est la bonne route à suivre« .
David Lammy doit par ailleurs composer avec le secrétaire britannique à la Culture Andy Burnham, qui organise un « Davos des entreprises créatives » les 26 à 28 octobre 2009 à Hertfordshire, sous le patronnage d’Universal Music et du portail chinois Sina.com. Bunham espère y annoncer « un protocole d’accord international » pour lutter contre le piratage sur Internet de manière coordonnée entre tous les états.
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