Alors que la pression occidentale s’accentue sur le régime iranien pour qu’il fasse toute la lumière sur son programme nucléaire, la BBC a révélé hier que le consortium Nokia-Siemens fourni depuis plusieurs mois des systèmes d’écoute téléphonique permettant aux officiels iraniens d’espionner d’éventuels dissidents. Or, avec les récents troubles survenus en Iran suite à l’élection présidentielle iranienne, Internet était devenu l’un des rares espaces où la communication était encore possible en Iran. Les autres médias traditionnels étant totalement muselés par les officiels iraniens.
Selon la chaine de télévision anglaise, Nokia-Siemens aurait ainsi fourni du matériel d’espionnage dès la mi-2008, suivi en mars 2009 d’un centre complet de renseignement. D’après des experts cités par le quotidien américain Wall Street Journal, ces équipements seraient d’ailleurs parmi les plus sophistiqués du monde. Un comble, alors que le régime fait face à des menaces de sanction de plus en plus lourdes de la part des principaux pays occidentaux.
Ces systèmes permettent ainsi de surveiller toutes les conversations, qu’elles soient orales, écrites (SMS) ou diffusées via Internet. Ainsi, dans le cadre des manifestations iraniennes contre la fraude qui aurait entaché le scrutin du 12 juin dernier, les officiels peuvent à loisir espionner les manifestants, anticiper leurs actions et au besoin intervenir pour empêcher toute contestation. Concrètement, la technique utilisée repose sur l’inspection en profondeur des paquets IP (DPI pour Deep Packet Inspection). Selon le WSJ, ce procédé serait systématique et analyserait ainsi la quasi-totalité du trafic.
Naturellement, le consortium Nokia-Siemens a cherché à minimiser l’affaire. Un porte-parole, Ben Roome, a d’abord expliqué qu’en vendant un réseau, la capacité d’intercepter les communications circulant dessus est intimement liée. Et de préciser plus tard dans la soirée que le matériel vendu respecte non seulement les standards internationaux, mais qu’en plus il n’est pas possible d’intercepter l’ensemble des communications. Selon Ben Roome, seules les communications vocales seraient concernées par cette surveillance.
Les responsables indiquent par ailleurs que le gouvernement iranien ne leur laissait pas le choix. Si Nokia-Siemens n’avait pas fourni ce système d’écoute, l’Iran n’aurait jamais accepté d’acheter leurs installations de téléphonie et de rénover leur infrastructure, laissant ainsi la place à un concurrent qui n’aurait pas été non plus sourcilleux sur ces problématiques. De plus, le consortium européen ne pouvait pas non plus prévoir les manifestations monstres qui allaient naitre suite à l’élection présidentielle.
Ce n’est pas la première fois qu’une entreprise est accusée de collusion avec un régime autoritaire. Récemment encore, Google avait été accusé par la Chine d’être un peu trop laxiste sur la surveillance et le blocage du contenu pornographique. Microsoft aussi a été critiqué il y a quelques temps pour avoir suivi l’embargo américain sur Cuba en coupant le logiciel de discussion instantanée Windows Live Messenger.
La question se pose donc : l’Iran ne fermerait-il pas totalement les accès à Internet (notamment Twitter) pour mieux voir les échanges sur le Réseau des réseaux ?
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