Alors que 10 % des joueurs français misent déjà sur des sites étrangers, un projet de loi qui doit encadrer l’ouverture à la concurrence du marché des jeux en ligne prévoit de confier au juge des référés le pouvoir de faire bloquer l’accès par les FAI à tout site qui n’aurait pas reçu l’agrément des pouvoirs publics. Le texte devrait être adopté à la rentrée par les députés.

Lorsqu’on pense au filtrage du net, tout le monde ne parle que de la loi de programmation de la sécurité intérieure (Loppsi), qui devait être la première à imposer le filtrage de sites web en France. Mais avec le départ de Michèle Alliot-Marie pour la Justice, le texte pourrait encore connaître du retard, sous la direction cette fois de Brice Hortefeux. Et c’est finalement un projet de loi sur les paris en ligne qui pourrait lui voler la vedette.

Le projet de loi relatif à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne, dont Jean-François Lamour est le rapporteur à l’Assemblée Nationale, sera présenté en commission des finances le 21 juillet prochain. Selon les dernières informations, il prévoit de donner à l’Autorité de Régulation des jeux en ligne, chargée de distribuer les agréments aux sociétés éditrices de sites de pari d’argent, la possibilité de saisir le juge des référés pour qu’il puisse « ordonner l’arrêt de l’accès à ce service » aux fournisseurs d’accès à Internet.

Contrairement à la Loppsi, qui prévoit que le filtrage sera directement ordonné par les services du ministère de l’intérieur aux FAI, le projet de loi prévoit donc un encadrement par l’autorité judiciaire. Un bon point, mais qui ne suffira pas à calmer la polémique.

Actuellement, seuls le PMU et la Française des Jeux peuvent légalement organiser des jeux d’argent sur Internet en France. Mais sous l’injonction de Bruxelles, ils perdront ce monopole début 2010 avec la libéralisation du marché. Afin de protéger les recettes du Trésor Public, qui perçoit les très juteuses taxes relatives aux jeux d’argent, l’Autorité de régulation des jeux en ligne va exiger le blocage en France de tous les sites qui ne versent pas de taxes en France. L’agrément qui évite le blocage sera toutefois délivré sous des prétextes plus avouables, comme le respect d’un certain nombre de règles relatives à la protection des joueurs aux tendances compulsives.

Même les entreprises agréées se feront shérifs dans leur marché puisque la loi sur les jeux en ligne prévoit que « toute personne physique ou morale ayant intérêt à agir » pourra saisir le juge des référés pour obtenir le blocage de leurs concurrents, notamment étrangers.

Le texte devrait être débattu fin septembre ou début octobre à l’Assemblée Nationale, selon Jean-François Lamour. L’ouverture du marché à la concurrence ne devrait être effective qu’en février ou mars de l’année prochaine. « L’objectif est d’être prêt pour la Coupe du monde de football en juin 2010« , a expliqué au Figaro l’ancien ministre des sports, qui devrait plaider pour une plus forte taxation des mises des paris sportifs.

Citée par Le Figaro, une étude menée par l’institut Ipsos Media CT indique que 20 % des joueurs en ligne dépensent actuellement plus de 50 euros par mois dans les jeux d’argent, et 43 % dépensent plus de 20 euros. Près de la moitié (45 %) se contentent de miser entre 1 et 5 euros par mois. Enfin, 10 % des joueurs misent sur des sites qui ne sont pas encore autorisés comme Bwin, Unibet ou Betclic.

Sous l’effet de l’agrément, les sites bloqués en France ne seront pas seulement ceux qui ne payent pas de taxes à l’Etat ou qui ne respectent pas un certain « code de conduite » censé protéger les internautes. Tous les types de jeux ne seront pas autorisés. Les machines à sous et les roulettes, par exemple, resteront l’exclusivité des casinos faits de briques et de ciment, à moins de violer la loi et de contourner les filtres pour aller y jouer sur des sites hébergés à l’étranger.

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