Ca serait faire les vierges éfarouchées que de mimer la surprise. Le ministre de la Culture Frédéric Mitterrand refusera toute idée de licence globale qui pourrait lui être proposée par la mission Zelnik. « Une chose est sûre, je ne reproposerai pas la licence globale dont personne ne sait exactement en quoi elle consiste et dont le principe même l’expropriation des droits d’auteur est refusé par tous les créateurs« , a-t-il affirmé dans une interview au Figaro.
Une déclaration qui sur le fond est attendue, mais qui sur la forme pose problème. N’est-ce pas justement le rôle de la mission Zelnik que d’ouvrir parmi toutes les pistes possibles celle de la licence globale, et de comprendre « exactement en quoi elle consiste » avant de se prononcer ? Et si ça n’est pas le cas, n’aurait-il pas fallu étendre le périmètre de la mission pour s’attarder sur la licence globale et comprendre ses mécanismes avant, éventuellement, de la rejeter in fine après un examen sérieux ?
Il est sûr que personne ne comprendra jamais ce en quoi consiste exactement la licence globale si personne ne se pose jamais la question, ou si tout le monde refuse d’entendre les réponses.
Par ailleurs, il est faux de prétendre comme le fait Frédéric Mitterrand que « tous les créateurs » refusent une prétendue « expropriation des droits d’auteur » qui serait induite par la licence globale. Tout d’abord, l’Adami et surtout la Spedidam, qui représentent les artistes-interprètes, avaient vigoureusement défendu la licence globale à l’époque de la loi DADVSI. Cette année encore, la plateforme Création Public Internet défend toujours une « contribution créative » très proche de la licence globale, et compte parmi ses membres l’Union de Syndicats des Artistes Interprètes Créateurs et Enseignants de la Musique, de la Danse et de l’ Art Dramatique (SAMUP), et le collectif « Pour le cinéma » de Juan Paulo Branco Lopez. Les exclure du statut de « créateur » est au mieux exagéré, au pire très déplaisant pour un ministre de la Culture.
Ils savent, en tout cas, que leurs réponses au questionnaire de la commission Zelnik, évidemment favorables à la contribution créative, ont attéri tout droit dans la poubelle.
Enfin, la licence globale n’est pas plus une « expropriation » des droits d’auteur que ne l’est le mécanisme de la copie privée, ou la licence légale qui permet aux radios de diffuser des disques sans l’autorisation préalable des producteurs. L’important n’est pas la propriété, donc la part d’expropriation qu’induit toute licence imposée, mais la rémunération de l’auteur qui souhaite continuer à créer. Réduire le droit d’auteur à une question de propriété intellectuelle c’est continuer à fermer la porte à la nécessaire adaptation du droit d’auteur à une ère numérique où la propriété est le plus souvent collective. Une sorte, c’est vrai, de néo-communisme.
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