Il nous faut vous prévenir que ce lien est doublement illicite (voire triplement). Le Secrétariat d’Etat à la Prospective et au Développement de l’économie numérique a ouvert aujourd’hui son site internet, mettant fin ainsi à l’anomalie qui faisait que « le ministère de l’internet » n’avait pas son propre site internet. Plutôt réussi, le site fournit toutes les informations utiles sur l’activité du ministère et de la secrétaire Nathalie Kosciusko-Morizet, et propose une « place publique » (un forum) pour recevoir les contributions des internautes sur différents sujets. C’est à cette occasion que NKM a ouvert la consultation sur « le droit à l’oubli numérique » dont nous parlions hier.
Mais aussi moderne techniquement soit-il, le site est vieillot dans sa philosophie. Les mentions légales, par ailleurs rédigées dans un français compréhensible et pédagogique (c’est trop rare pour ne pas être signalé), préviennent par exemple que « tous les contenus présents sur le site du secrétariat d’Etat à la Prospective et au Développement de l’économie numérique sont couverts par le droit d’auteur » et que « toute reprise est dès lors conditionnée à l’accord de l’auteur« . Le site ne fait absolument pas usage des licences libres pour favoriser la diffusion des informations du secrétaire d’Etat. Les mentions légales citent même l’exemple de l’agenda du secrétariat d’Etat comme un contenu « éditorial » (sic) dont la reproduction est soumise à une autorisation préalable. Dommage.
Mais ça n’est rien comparé à l’article 3 des mentions légales. Il y a quelques mois, nous avions moqué le très grand nombre de grandes entreprises qui interdisent les liens hypertextes vers leur site internet, sauf autorisation préalable. Nous avions dit que ça n’était ni pertinent d’un point de vue technique, ni utile d’un point de vue juridique. Sauf à vouloir se munir d’une arme contractuelle pour attaquer ceux qui, par exemple dans un article critiquant la société, créent un lien vers son site internet sans avoir eu l’autorisation. Or les mentions légales du site de NKM utilisent une philosophie proche.
Dans son cas, il s’agit d’une autorisation par défaut, mais sous conditions :
Le site du secrétariat d’Etat autorise tout site Internet ou tout autre support à le citer ou à mettre en place un lien hypertexte pointant vers son contenu sous réserve que :
* le contenu soit rendu visible par l’ouverture d’une fenêtre indépendante ;
* le lien hypertexte mentionne explicitement le site du secrétariat d’Etat dans son intitulé.Les informations utilisées ne doivent l’être qu’à des fins personnelles, éducatives, associatives ou professionnelles ; toute utilisation à des fins commerciales ou publicitaires étant interdite.
Cette autorisation ne s’applique en aucun cas aux sites Internet diffusant des informations à caractère raciste, pornographique, xénophobe, polémique ou pouvant, d’une façon générale porter atteinte à la sensibilité du plus grand nombre.
Notre premier lien était donc doublement interdit, puisque nous le faisons ouvrir sur la page actuelle (il n’ouvre pas de nouvelle page), et qu’il ne mentionne pas explicitement le site du secrétariat d’Etat dans son intitulé. On s’amusera d’ailleurs que la grande « tweeteuse » qu’est Nathalie Kosciusko-Morizet ne puisse pas faire de liens vers son propre site internet sur Twitter, puisqu’il est uniquement possible d’y écrire des URL, le plus souvent raccourcies.
Mais on s’étonne surtout de lire que l’autorisation préalable ne s’applique « en aucun cas aux sites Internet diffusant des informations à caractère polémique ». Qu’est-ce que cela veut dire ? Quelle est la définition juridique d’informations à caractère polémique ?
Si l’on critique comme ici les mentions légales du site de NKM et que l’on pointe en respectant les règles vers les mentions légales du site du Secrétariat d’Etat à la Propective et au Développement de l’économique numérique (ouf), est-on néanmoins dans l’illégalité parce que notre article est polémique ?
Notre premier lien était illicite au regard des mentions légales du site internet, mais nous mettons au défi le cabinet de NKM de porter plainte contre Numerama. Bonne chance aux avocats qui trouveront matière juridique à défendre l’interdiction de créer un lien hypertexte vers un site officiel. Et espérons qu’ils ne portent jamais plainte contre un site « polémique » qui aurait osé créer un lien.
La simple présence de cette menace hypothétique dans les mentions légales est intolérable. Il faut souhaiter qu’elle disparaisse rapidement.
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