C’est sans doute un aperçu de ce qui arrivera bientôt en France avec le développement de la fibre optique. Selon The Inquirer, l’opérateur British Telecom se serait engagé à prendre 2,6 % du capital de la société OnLive, dans le but de proposer en exclusivité un pack réunissant son offre d’accès à haut débit et un service de jeux vidéo entièrement dématérialisé.
L’idée d’OnLive est de mettre fin aux consoles de jeux vidéo et aux ordinateurs surpuissants des gamers, par un principe de « cloud gaming ». Lorsqu’un abonné souhaite jouer à un jeu vidéo, c’est un serveur distant qui se charge de lancer le jeu et de réaliser en temps réel tous les lourds calculs de rendu de l’image et du son. Il n’y a pas de téléchargement. Le joueur ne reçoit sur un petit boîtier que le flux audio-vidéo correspondant. Comme si vous aviez votre téléviseur dans le salon, et qu’un très long câble le reliait à une console hébergée à un millier de kilomètres de là, chez son constructeur.
L’avantage pour les joueurs est qu’ils n’ont pas à se soucier de la compatibilité de leur matériel avec les jeux vidéo, et qu’ils n’ont plus besoin de dépenser des fortunes pour rester au goût du jour. C’est OnLive qui se charge de mettre à jour ses serveurs, pour un coût finalement plus faible qu’un constructeur comme Sony qui doit mettre entre les mains de chaque client une Playstation surpuissante. Ces dernières coûtent beaucoup plus cher à produire que le prix auquel elles sont vendues, et restent la plupart du temps éteintes. Nous sommes loin de l’optimisation des ressources, alors qu’OnLive n’a qu’à ajouter des serveurs dans ses datacenters pour répondre au plus juste à la demande du moment.
Pour les éditeurs, l’avantage ressenti est bien sûr immense. Le risque de piratage devient nul, et il n’est plus possible pour les joueurs de prêter ou de revendre les jeux qu’ils ont fini. Tout n’est plus que la location d’un droit d’accès à une séance de jeu vidéo à distance. Le DRM parfait. La formule pourrait aussi changer le modèle économique de l’industrie. Les éditeurs pourraient ne plus être payés en fonction du nombre de copies qu’ils vendent, mais en fonction du temps que consacrent les joueurs à leurs jeux, par un partage du coût de l’abonnement. Un vieux jeu qui a toujours beaucoup de succès continuerait ainsi à rapporter de l’argent à son éditeur.
Après 8 années de développement dans l’ombre, OnLive prévoit de lancer le 17 juin prochain son service de jeux vidéo à distance aux Etats-Unis. Les joueurs devront débourser 14,95 $ par mois pour accéder au service, depuis n’importe quel ordinateur (Mac ou PC). Un boîtier sera également proposé pour les téléviseurs. Mais attention, les 14,95 $ ne comprennent pas le prix de location ou d’achat (si l’on peut parler d’achat…) des jeux vidéo. Le forfait de base donne uniquement accès aux démos, aux serveurs multijoueurs, aux sauvegardes et autres services désormais bien connus comme les gamer tags, les profiles, amis, etc.
Au départ, six titres seront disponibles : Prince of Persia, Dragon Age Origins, Metro 2033, Borderlands, Assassins Creed 2, et Mass Effect 2.
Des problèmes de latence en vue ?
Mais techniquement, le « cloud gaming » peut-il vraiment fonctionner ? Il y a de quoi être extrêmement dubitatif. Les obstacles technologiques sont nombreux, et pour certains semblent même insurmontables. Comment résoudre les problèmes des temps de latence qui risquent de rendre la plupart des jeux tout simplement injouables ?
On pense bien sûr immédiatement au temps qu’il faudra aux instructions de commande pour parvenir jusqu’aux serveurs des jeux vidéo. Le temps qui passe entre le moment où l’on appuie sur le bouton « tir » et le moment où le serveur reçoit l’instruction est bien sûr plus long lorsqu’il faut passer par le boîtier OnLive où sont branchées les manettes, puis par le modem ADSL, puis par les différents serveurs qui relayent finalement l’instruction jusqu’au datacenter d’OnLive.
Mais on pense surtout au temps d’encodage vidéo qui relèvera de l’exploit technologique si la promesse est tenue. Une fois l’instruction de « tir » reçue, il faut qu’OnLive encode immédiatement l’image correspondante calculée par les serveurs où sont exécutés les jeux vidéo, et qu’il renvoie cette image vers l’écran du joueur avec un temps de latence extrêmement faible pour que le tir apparaisse à l’écran quasiment dès que le joueur a appuyé sur le bouton. On peine à imaginer la puissance de calcul qu’il faut pour délivrer (ce que promet OnLive) un flux haute définition en 720p à 60 images par seconde. Et même à supposer que les serveurs d’encodage soient assez puissants, il reste tout de même la latence imposée par l’infrastructure réseau elle-même.
Pour toutes ces raisons, OnLive préconise au minimum une connexion à 5Mpbs, sans Wi-Fi. Aux Etats-Unis, la start-up prévient que les abonnés devront être à moins de 1000 miles (1600 km) des datacenters présents au Texas, en Virginie et en Californie. L’accord avec BT lui assurera aussi une présence au plus près des abonnés en Grande-Bretagne.
Mais on attend de voir pour le croire. S’il y a déjà eu des démos publiques, elles ont toutes été réalisées dans des conditions optimales qui seront loin d’être celles de la plupart des joueurs. La principale démonstration faite l’an dernier à la Game Developers Conference (GDC) s’était déroulée sur des serveurs situés à moins de 75 kilomètres.
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