Un certain mouvement de panique agite aujourd’hui les défenseurs de la neutralité des réseaux aux Etats-Unis. Le New York Times a révélé mercredi qu’un accord est en cours de finalisation entre le moteur de recherche Google et l’opérateur de télécommunications Verizon, qui donnerait un large coup de pied dans le fragile édifice de la neutralité du net.
Avare en détails, le journal indique simplement que l’accord « pourrait permettre à Verizon d’accélérer certains contenus en ligne à destination des internautes si les créateurs de contenus acceptent de payer pour le privilège« . Des éditeurs de sites comme YouTube paieraient ainsi un droit de passage au fournisseur d’accès, pour qu’il donne la priorité à leurs contenus plutôt qu’à ceux des concurrents. Inversement, les abonnés pourraient aussi devoir payer un surplus pour accéder plus rapidement aux sites les plus gourmands en bande passante, à l’image de ce que Free envisage en France pour l’accès à la vidéo de rattrapage sur sa Freebox.
L’accord, qui pourrait être signé dès la semaine prochaine, serait une sorte de pacte de non agression passé entre les deux géants américains pour entretenir leurs bonnes relations commerciales. « Google, dont le système d’exploitation Android équipe nombre de téléphones mobiles de Verizon, accepterait de ne pas s’opposer à la possibilité pour Verizon de gérer comme il l’entend son réseau Internet haut-débit« , écrit ainsi le New York Times. En somme, Google arrêterait de défendre la neutralité du net si Verizon continue de promouvoir Android contre l’iPhone d’Apple.
Le quotidien indique que les discussions entre Google et Verizon sont nées des négociations infructueuses que tente de mener la Commission Fédérale des Communications (FCC) dans sa volonté de reprendre en main le dossier de la neutralité du net. L’organe de régulation s’était vu signifier en justice dans un conflit contre Comcast qu’il n’avait pas le pouvoir de réguler la neutralité des réseaux, ce qui l’a profondément affaibli. Depuis, la FCC a accepté d’organiser des « réunions secrètes » qui se tiennent en marge d’une consultation publique ouverte en juin dernier, pour aboutir à un accord global. Au moins neuf réunions auraient ainsi été tenues ces deux derniers mois avec notamment Google, Verizon, AT&T, Skype, des câblo-opérateurs et l’Open Internet Coalition. Mais les discussions sont au point mort sur les aspects les plus sensibles.
« Nous sommes déterminés à participer aux négociations ouvertes par la FCC. Nous sommes optimistes sur le fait que ce processus va aboutir à un consensus qui pourra maintenir un Internet ouvert, et l’investissement et l’innovation nécessaires pour le rendre durable« , assure au New York Times un représentant de Verizon. Mais l’accord avec Google ressemble à l’arme atomique que pourrait déployer l’opérateur s’il n’avait pas la garantie d’avoir un certain niveau de contrôle sur le trafic auquel il souhaite donner priorité, et sur lequel il peut espérer le meilleur retour sur investissement.
Google, s’il signe un tel accord, confirmerait qu’il a joué double-jeu sur la question de la neutralité du net. Il s’affirme défenseur absolu, en dénonçant notamment les FAI qui brident BitTorrent, mais il avait déjà créé l’émoi en 2008 avec son projet OpenEdge. Il s’agissait alors de proposer aux fournisseurs d’accès qu’ils hébergent directement dans leurs infrastructures des serveurs de mise en cache des services de Google, et notamment de YouTube, pour réduire les coûts en bande passante et permettre un accès plus rapide qu’aux services concurrents.
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