Très mauvaise nouvelle pour les fournisseurs d’accès à Internet, et plus largement pour la défense de la liberté de communication sur Internet. Dans une ordonnance de référé très sévère dont Numerama a pu prendre connaissance, le tribunal de grande instance de Paris a ordonné vendredi aux fournisseurs d’accès à Internet de « mettre en œuvre ou faire mettre en œuvre, sans délai, toute mesure propres à empêcher l’accès, à partir du territoire français et/ou par leurs abonnés sur ce territoire, au contenu du service de communication en ligne (Stanjames.com)« .
C’est la première fois que la justice ordonne le blocage d’un site internet de paris en ligne après mise en demeure par l’Autorité de Régulation des Jeux en Ligne (ARJEL). Il s’agit de l’application d’une procédure inaugurée par la loi sur les jeux en ligne votée par le Parlement au mois d’avril, sans rien que ne soit ne précisé sur les méthodes de filtrage à employer, déjà réputées inefficaces, ni sur les modalités de publicité et de mise à jour des listes des sites à bloquer, ni de la prise en charge des coûts du blocage, pourtant colossaux.
Selon les termes du jugement, les opérateurs doivent « prendre toutes mesures de nature à permettre l’arrêt de l’accès au service en cause, soit toute mesure de filtrage, pouvant être obtenu (…) par blocage du nom de domaine, de l’adresse IP connue, de l’URL, ou par analyse du contenu des messages, mises en œuvre alternativement ou éventuellement concomitamment, de manière à ce qu’elles soient suivies de l’effet escompté sur le territoire français« . C’est dire si l’éventail des mesures à prendre est large, et intrusif. Il va ainsi jusqu’à préconiser l’inspection profonde des paquets (DPI), pour vérifier que l’abonné ne communique de quelconque manière avec le site interdit.
Chaque opérateur devra « déterminer les mesures qui lui apparaîtront les plus adaptées et les plus efficaces au moment de son intervention« , et « tenir compte tant de l’évolution de la situation technique et juridique des auteur et éditeur ainsi que de l’hébergeur concernés que des effets des divers filtrages suscpectibles d’être mis en œuvre« , indique la présidence du tribunal.
En somme, les FAI ont à la fois le devoir d’effectuer une veille pour modifier leurs paramètres de filtrage au jour le jour et continuer à bloquer le site s’il change d’adresse IP ou d’URL… mais ils doivent en assumer seuls les conséquences et éviter les surblocages. Une véritable quadrature du cercle, qui n’appelle de la part du tribunal aucune pitié.
« Ces mesures devront être mises en œuvre sans délai« , intime ainsi la juridiction qui accorde uniquement un délai de deux mois avant de prononcer les premières astreintes de 10.000 euros de pénalité par jour de retard.
Rappelons que dans leur saisine au Conseil constitutionnel, les députés de l’opposition n’avaient pas demandé aux sages de se prononcer sur la conformité de telles mesures de blocage avec la Constitution.
Les FAI concernés par l’ordonnance sont Numericable, Orange, SFR, Free, Bouygues Telecom, Darty et Auchan Telecom.
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