Le directeur général de Google, Eric Schmidt, s’était fait remarquer l’an dernier des partisans de la protection de la vie privée sur Internet en estimant que la vie privée n’avait de sens que pour ceux qui ont quelque chose à se reprocher. « Si vous ne souhaitez pas qu’on le sache, mieux vaut encore ne pas le faire« , résumait-il dans une phrase qui lui a valu une montagne de mauvaise presse. Google avait même blacklisté pendant plusieurs mois le magazine américain CNET lorsque celui-ci a démontré qu’il était possible de retrouver beaucoup d’informations personnelles sur Eric Schmidt en utilisant les résultats du moteur de recherche.
Samedi, c’est dans le Washington Post que le patron de Google a démontré le peu d’ambition qu’il avait pour le respect de la vie privée. Dans un long article, le journal évoque la stratégie de Google à long terme. Résumons là ainsi : tout savoir sur tout le monde pour proposer en permanence tout que vous avez voulu savoir sans jamais avoir pensé à le demander.
« Je pense en réalité que la plupart des gens ne veulent pas que Google répondent à leurs questions. Ils veulent que Google leur dise ce qu’ils devraient faire ensuite« .
« Nous savons en gros qui vous êtes, en gros ce qui vous intéresse, en gros qui sont vos amis« , développe Eric Schmidt, qui en déduit qu’il sera bientôt possible de rappeler à quelqu’un – par son mobile Android bien sûr – qu’il lui manque du lait et que, ça tombe bien, telle boutique à côté en vend. « La technologie va être tellement bonne qu’il sera très difficile pour les gens de voir ou de consommer quelque chose qui n’a pas été quelque part ajusté pour eux« . Alors que le 20ème siècle était celui de l’industrialisation (du clonage des mêmes objets) et de la publicité de masse, la personnalisation et le ciblage à l’extrême seront la signature marketing du 21ème siècle.
Quant à la vie privée et à la gestion de l’e-reputation, Eric Schmidt fait d’abord mine de s’inquiéter. « Je ne crois pas que la société comprend ce qui se passe lorsque tout est disponible, peut se savoir, et être enregistré par tout le monde à tout moment« , dit-il. Mais « apparemment sérieusement » d’après le journal, il prédit que bientôt les jeunes auront la possibilité de demander à changer de nom lors de leur majorité, pour effacer le passé que leurs patrons et nouveaux amis ne sauraient voir. Une solution radicale à la question du droit à l’oubli.
Actuellement, selon le site de l’administration française, « toute personne peut demander à changer de nom, lorsqu’elle a un intérêt légitime à le faire« . Mais les intérêts légitimes reconnus sont limités : nom ridicule ou péjoratif, nom à consonance étrangère, nom menacé d’extinction, … Le fait de cacher ses beuveries et autres casseroles diffusées sur Internet n’est pas encore admis comme un motif suffisant.
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