Les caricatures de presse ont-elles leur place sur l’App Store ? La question peut sembler brutale, surtout aux yeux des aficionados de la marque à la pomme. Pourtant, dans la mesure où la caricature présente parfois des traits de caractère ridicules, déplaisants ou obscènes, le genre peut se heurter à la politique d’Apple en matière de contenus mobiles.
La boutique en ligne de la firme de Cupertino a déjà connu un précédent fâcheux. En avril dernier, l’application mobile de Mark Fiore a été rejetée au motif qu’elle enfreint la disposition 3.3.14 de l’iPhone Developer Program License Agreement. L’affaire aurait pu passer inaperçue si le caricaturiste n’avait pas remporté l’édition 2010 du Prix Pulitzer de la caricature.
Devant la levée de boucliers, Apple a fait machine-arrière et a invité Mark Fiore à soumettre à nouveau son application mobile. « J’ai un traitement de faveur parce que j’ai le Pulitzer » avait-il alors déclaré, bien conscient que son Prix Pultzer avait été une aide précieuse. Mais nombre de journaux ou de caricaturistes n’ont pas la chance d’être distingué par une prestigieuse récompense.
Bakchich rapporte que Charlie-Hebdo s’est retrouvé devant le même dilemme. Réputé pour ses papiers satiriques, l’hebdomadaire propose également dans ses colonnes des caricatures de personnalités. Or, c’est bien ce dernier point qui aurait découragé Charlie-Hebdo.
« Il s’agirait plutôt de certains dessins considérés comme outranciers qui risquaient de ne pas passer la barrière de la censure » a expliqué Charb à nos confrères. « Une entreprise est venue nous démarcher pour développer notre application. Mais à la fin, le type nous a expliqué qu’on n’aurait pas le final cut sur la publication sur iPad. On les a donc envoyés bouler« .
L’intransigeance d’Apple vis-à-vis des contenus publiés sur l’App Store ne date pas d’hier. Pour protéger son modèle économique de la boutique en ligne, la firme de Cupertino a édicté des règles rigides qui la font passer parfois pour le responsable de l’intégrité morale de ses clients. Mais si Apple reste propriétaire de sa plate-forme, Charlie-Hebdo ne doit pas perdre de vue l’existence de solutions alternatives. Car l’univers mobile ne s’arrête pas, et ne doit pas s’arrêter, à Apple.
D’une part, l’hebdomadaire peut se développer sur d’autres plates-formes moins sévères en matière de contenus. C’est notamment le cas de l’Android Market, le magasin attitré des smartphones propulsés par Android. Avec la multiplication des mobiles sous le système d’exploitation libre, le développement d’une version Android d’une telle application est à envisager.
Ensuite, il est toujours possible de contourner les restrictions de l’App Store en développant une application entièrement conçue en HTML 5. De cette façon, les possesseurs d’iPad ou d’iPhone pourraient toujours profiter des caricatures de Charlie-Hebdo.
Cependant, l’hebdomadaire devrait certainement faire une croix sur l’appétissant gâteau de l’App Store. Rappelons que l’App Store reverse 70 % de la vente d’une application au créateur de l’application. Or, les alternatives en HTML sont relativement rares et moins populaires que l’App Store. Dons les applications publiées sur ces espaces moins susceptibles d’être achetées.
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