Alors que le ministère de la Culture avait prévu d’octroyer 12 millions d’euros au fonctionnement de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi), la députée Muriel Marland-Militello (UMP) avait demandé une rallonge pour qu’elle bénéficie de 14 millions d’euros.
« La lutte contre les atteintes aux droits de propriété intellectuelle sur Internet est une priorité que nous a fixée, à fort juste raison, le Président de la République« , justifiait Mme Marland-Militello dans son amendement à la loi de finances 2011. « Afin que la volonté du législateur soit respectée, cette autorité administrative indépendante nouvelle doit avoir les moyens de mener ses actions de manière efficace dès ses débuts« , ajoutait-elle.
Elle se défendait malgré tout de vouloir accentuer la riposte graduée. « Ces deux millions d’euros supplémentaires devront être affectés à l’accélération du développement et de l’accessibilité d’une offre légale de qualité, fraîche et diverse, qui constitue la clé principale de la lutte contre le piratage des œuvres culturelles« , expliquait ainsi l’élue, qui avait été rapporteur des lois Hadopi pour la commission des affaires culturelles.
Pour financer cette augmentation sans accentuer la dette publique, elle proposait de prélever les deux millions d’euros sur les crédits accordés au passage à la télévision tout numérique.
Mais l’amendement, dont on dit dans les couloirs qu’il n’avait aucune chance d’être adopté, a été retiré par Muriel Marland-Militello avant d’être examiné par les parlementaires. Sauf rebondissement, les crédits versés à l’Hadopi pour 2011 devrait donc rester à 12 millions d’euros, ce qui le place tout de même à un niveau proche de la CNIL.
Quel budget dépensé en 2010 ?
Ceux qui s’intéressent aux questions budgétaires pourront trouver sur le site de l’Hadopi le budget prévisionnel 2010 de l’autorité (.pdf), arrêté le 30 juin. Il fait apparaître une enveloppe globale de 10,5 millions d’euros, mais une partie non dépensée cette année pourrait être reportée l’année prochaine, ce qui dans les faits augmentera le budget de l’Hadopi par rapport aux crédits accordés par la loi de finances. Les dépenses réellement engagées cette année devront être publiées au plus tard au mois d’avril 2011.
Certaines lignes de crédits comme les achats d’étude et prestations de service (410 000 euros) n’ont finalement été que très peu utilisées, tout comme les 920 000 euros provisionnés pour la publicité et les relations publiques. Le ministère de la Culture avait imaginé une grande campagne de publicités pour accompagner le lancement de l’Hadopi et de la riposte graduée, et lancé un appel d’offres en ce sens, mais une fois constituée l’Hadopi a rejeté toutes les propositions et déclaré l’appel d’offres infructueux. La vision caricaturale du piratage suggérée par la rue de Valois aux agences de communication n’aurait pas du tout été au goût de l’Hadopi, qui a préféré tout annuler lorsqu’elle en a eu le pouvoir. La seule opération de communication réalisée par la Haute Autorité fut la distribution de flyers aux péages des autoroutes.
La réalisation du site Internet de l’Hadopi entre dans les frais d’immobilisation incorporelles, avec le système d’information qui permet la mise en œuvre de la riposte graduée (un total provisionné de 2,6 millions d’euros, dont ne connaît pas encore la répartition, et qui représente une ligne budgétaire proche de zéro euro pour l’an prochain).
Par ailleurs, il avait été prévu jusqu’à 335 000 euros de frais postaux et de télécommunication, essentiellement pour financer l’envoi des lettres remises contre signature lors des seconds avertissements. Mais le retard pris par la riposte graduée n’a pas permis d’entamer cette ligne du budget. A notre connaissance, aucun courrier n’a été envoyé aux abonnés.
Parmi les autres dépenses provisionnées mais non encore engagées à ce jour figurent les indemnités de présence versées aux présidentes et aux membres de la Commission de protection des droits et au Collège de l’Hadopi (parmi lesquels figurent Frank Riester et Michel Thiollière, les rapporteurs des lois Hadopi à l’Assemblée et au Sénat). Il était prévu une enveloppe de 190 000 euros pour l’année, mais les arrêtés qui doivent fixer les montants d’indemnités n’ont toujours pas été publiés, ce qui bloque tout paiement. La Haute autorité dit même ne pas savoir s’ils auront un effet rétroactif. En principe, les membres des deux organes de l’Hadopi devraient être indemnisés autour de 250 euros brut par séance, avec 1 séance par semaine pour la CPD, et 2 séances par mois en moyenne pour le Collège.
Dans les principales enveloppes, on trouve également 470 000 euros provisionnés pour la rémunération d’intermédiaires et les honoraires. Il s’agit notamment de la rémunération versée au professeur Riguidel pour la rédaction des projets de spécifications fonctionnelles des moyens de sécurisation (une mission qui pourrait être prolongée en 2011), de celles qui devraient être proposées aux experts des Labs, et des honoraires versés à des cabinets d’avocats pour recueillir leur expertise, y compris parfois pour l’interprétation de certains points de la loi.
Au global, le budget 2011 ne devrait être sur le papier que de 1,5 million d’euros plus élevé que celui prévu pour 2010. Mais il bénéficiera du report des sommes non engagées cette année, et ne sera pas amputé par les frais de création de la Haute autorité (qui représentent 3,2 millions d’euros en 2010). Les volets « offre légale » et « moyens de sécurisation » qui commencent à se déployer ne devraient pas représenter une dépense très importante, ce qui au final permettra à l’Hadopi de disposer de davantage de crédits pour la riposte graduée.
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