La Commissaire européen en charge de la société de l’information, Neelie Kroes, a répondu le 14 décembre 2010 à la question d’un eurodéputé néerlandais, qui s’interrogeait sur la conformité de la loi Hadopi avec le droit communautaire. Dans sa réponse, découverte par le juriste Benoît Tabaka, la Commissaire se contente du minimum syndical pour donner son blanc-seing, timide, à la riposte graduée française.
« Le modèle français a été discuté entre les autorités françaises et la Commission à plusieurs occasions. En l’absence de toute plainte, et se basant sur les informations actuellement à notre disposition, la Commission n’a aucune raison de croire que le modèle français est contraire au droit communautaire« , écrit Neelie Kroes.
Elle rappelle tout de même que dans sa décision du 10 juin 2009, le Conseil constitutionnel avait censuré la loi Hadopi 1, en expliquant qu’Internet est devenu une composante essentielle de la liberté d’expression et de communication, et que seul un juge pouvait ordonner la suspension de l’accès à Internet (ce qui a été prévu ensuite par la loi Hadopi 2).
La Commissaire rappelle aussi les termes de l’amendement Bono, largement remanié après d’âpres négociations, qui dispose que « les mesures de nature à restreindre ces droits ou libertés fondamentaux peuvent seulement être imposées dans des circonstances exceptionnelles si elles sont appropriées, proportionnées et nécessaires dans une société démocratique« , et qu’elles doivent « être soumis à des garanties procédurales appropriées en conformité avec la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et avec les principes généraux du droit communautaire, y compris la protection judiciaire effective et le droit à un procès équitable« .
Hasard ou non, Neelie Kroes ne cite pas la partie du texte qui précise que pour ordonner des mesures de suspension de l’accès à Internet, « le principe de la présomption d’innocence et le droit pour la personne d’être entendu (doivent être) pleinement respectés« . Ce qui est discutable en France, puisque la culpabilité est présumée, et la sanction prononcée selon une procédure d’ordonnance pénale qui s’épargne la défense de l’accusé. Dans une circulaire, la Chancellerie demande même aux procureurs d’éviter les enquêtes, et de considérer que les PV adressés à l’Hadopi par les ayants droit « font foi jusqu’à preuve contraire« .
Dans sa réponse, la Commissaire assure néanmoins que « la Commission n’est pas au courant de tentatives des autorités françaises d’exporter leur approche nationale » dans d’autres états membres, et que les Etats se devaient de respecter les droits fondamentaux. En novembre 2009, la Commission européenne avait ainsi prévenu l’Espagne que tout projet de riposte graduée sans juge serait sanctionné.
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