C’est probablement parmi les pires scénarios imaginés par la Haute Autorité pour la Diffusion des Oeuvres et la Protection des droits sur Internet (Hadopi). Dans sa riposte graduée automatisée, la commission de protection des droits a fait envoyer un courriel d’avertissement à un couple de parents qui n’aurait rien d’extraordinaire… s’ils n’étaient les parents de Maxime Rouquet, le candidat du Parti Pirate qui s’est présenté aux législatives dans les Yvelines. La mauvaise cible par excellence, puisque le bougre médiatise l’affaire et indique qu’il peut « affirmer avec certitude qu’il s’agit soit d’un « faux positif », soit d’un petit malin qui a récupéré le mot de passe du réseau WI-FI« . Ses parents, contrairement à leur progéniture, n’auraient rien de pirates. Ils n’auraient encore moins téléchargé le film Night and Day dont on leur accuse d’avoir permis la contrefaçon par défaut de sécurisation.
« Mes parents m’appellent il y a quelques jours pour me demander si je ne connais pas la meilleure : ils ont été flashés !« , raconte Maxime Rouquet sur son blog du Parti Pirate. « Eux qui ne sauraient même pas utiliser un logiciel de partage de fichier, et dont j’ai correctement sécurisé l’ordinateur et le réseau WI-FI (pour précisément éviter qu’ils ne soient ennuyés plus qu’ils ne l’ont déjà été en raison de ma « carrière » politique)…« , assure-t-il.
« Ca n’a pas plu à mes parents d’être poursuivis par la HADOPI alors qu’ils ne partagent pas…Il a fallu un peu de patience pour leur faire comprendre les tenants et aboutissants du fait qu’on ne les accuse pas d’avoir « téléchargé », mais de ne pas avoir empêché que quelqu’un le fasse avec leur adresse IP (et ce même si c’est impossible)« .
Pour le moment, Maxime Rouquet s’est contenté d’utiliser le modèle de réponse à l’Hadopi que nous avons mis à disposition sur nos forums, et de demander au secrétaire général de l’Hadopi Eric Walter la liste des fonctionnalités pertinentes des logiciels de sécurisation que ses parents sont censés installer. Il attend toujours une réponse, et pour cause. Elle n’est pas encore arrêtée.
Le scénario est l’un des pires pour l’Hadopi, car en cas de contestation devant les tribunaux administratifs, le PV établi pour les ayants droit et exploité par l’autorité administrative pourrait tomber. Ce qui entraînerait l’arrêt total de la riposte graduée. Absolument aucune procédure de certification n’a validé la méthode employée par la société nantaise TMG, qui collecte les adresses IP. Or cet exemple montre encore une fois qu’il y a au minimum un doute important sur la fiabilité des collectes, dont la CNIL avait noté qu’il n’était pas contrôlé. Si l’Hadopi a exprimé son souhait de faire procéder à un audit indépendant, aucun relevé ne sera jugé fiable en l’absence de certification.
La question de la fiabilité de la collecte des adresses IP n’est pas d’ailleurs le seul problème de preuve. L’an dernier, la présidente de la Commission de protection des droits avait estimé que les PV faisaient foi, et que « si l’abonné n’a pas changé de comportement au bout de trois fois, il n’a donc pas mis en œuvre de moyen de sécurisation« , et que « ce sont les conséquences de vos actes qui prouvent l’infraction« . Or comme nous l’avons sans cesse répété, le fait de repérer un téléchargement illégal prouve soit qu’il y a absence totale de sécurisation, soit qu’il y a inefficacité du moyen de sécurisation mis en place. Or on ne peut pas, à distance, savoir si cette inefficacité est due à un manque de diligence de l’abonné (l’un des critères de la négligence caractérisée), ou au moyen de sécurisation lui-même.
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