Les opposants au filtrage ne sont pas au bout de leurs peines. Alors que le conflit entre le FAI Scarlet et la Sabam, une société de gestion des droits d’auteur, semblait éloigner le spectre du bridage en Belgique grâce à l’intervention de l’avocat général de la CJUE, le FAI Telenet a reconnu cette semaine avoir entrepris des tests destinés à brider les échanges de fichiers sur le réseau BitTorrent.
C’est le quotidien flamand Het Belang van Limburg, cité par le journal francophone La Dernière Heure, qui rapporte l’information. De nombreux clients du FAI belge ont constaté depuis plusieurs semaines une chute significative de leur vitesse de téléchargement lors de l’utilisation d’un client BitTorrent. Une baisse d’autant plus incompréhensible que ces abonnés disposent d’abonnements haut et très haut débit.
« Souvent la vitesse de téléchargement est dix à vingt fois plus faible que ce que promet leur abonnement Telenet » indique Dima Oliynyk, la gestionnaire du forum de Tik Vzw, une association belge d’abonnés. Les débits chutent à 200 kilobytes par seconde, alors que les abonnements du fournisseur d’accès à Internet évoquent des transferts très rapides, allant théoriquement de 20 à 100 Mbps.
Certaines limitations existent déjà, comme en témoigne les mentions accompagnant ces forfaits. « En cas de consommation de volume excessive qui risque de nuire au confort d’autres abonnés, Telenet peut vous demander d’adapter votre consommation de volume. Par consommation de volume excessive, on entend une consommation au moins deux fois supérieure au volume moyen consommé par tous les autres abonnés Internet à votre produit« .
« En cas de consommation de volume excessive, ce qui est déterminé de manière dynamique et dépend du volume disponible sur le réseau local, Telenet se réserve le droit de réduire la vitesse de téléchargement au minimum (512 Kbps) jusqu’à la fin de période de relevé en cours » précise encore le FAI. Le « téléchargement libre » évoqué dans le dernier abonnement ne concerne que des données légales.
Le porte-parole de Telenet, cité par La Dernière Heure, a confirmé que l’opérateur avait entamé des tests pour freiner l’échange de contenus sur les réseaux peer-to-peer. Ce n’est certes pas la première fois qu’un fournisseur d’accès à Internet est suspecté de filtrer les échanges P2P. Des affaires de ce genre ont notamment éclaté aux États-Unis, avec Comcast, et au Canada, avec Bell.
Il y a néanmoins, en toile de fond, l’avis de l’avocat général de la Cour de justice de l’Union européenne. Celui-ci a indiqué, dans l’affaire opposant la Sabam à Scarlet, que l’obligation de surveillance et de filtrage des fournisseurs d’accès à Internet pour empêcher les atteintes au droit d’auteur n’était pas conforme au droit communautaire, sauf à ce qu’elle soit parfaitement encadrée par la loi.
Reste à savoir si la Cour de justice de l’Union européenne suivra l’avis de l’avocat général. En attendant, cette affaire pourrait bien avoir un impact positif sur le processus législatif visant à inscrire la neutralité du net dans la constitution belge. Le mois dernier, les socialistes avaient déposé une proposition de loi visant à établir une « véritable laïcité informationnelle » dans l’espace numérique.
La Belgique suivrait alors la voie tracée par le Chili et les Pays-Bas, les deux seuls pays à l’heure actuelle à avoir inscrit la neutralité du net dans leur législation.
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