Dimanche, Eric Besson a publié un communiqué qui affirme que « le gouvernement n’envisage aucune restriction de l’accès à Internet et travaille bien au contraire au développement du très haut débit fixe et mobile sur l’ensemble du territoire et pour l’ensemble des Français« . Il ajoutait que « le gouvernement travaille à encadrer l’utilisation du terme « illimité » par les opérateurs afin de protéger les consommateurs contre certains abus« . Or c’est là que figure le principal danger.
En se voulant rassurant, le ministre de l’industrie chargé de l’économie numérique va exactement là où les opérateurs veulent être conduits pour enterrer Internet en bonne et due forme. Le ministre répond à la préoccupation première des Français (pouvoir continuer à se « net-goinfrer » pour le même prix) en ne voyant pas que l’enjeu principal n’est pas tant dans le plafonnement de la consommation que dans la mort du concept même d’internet.
Les fondements d’Internet n’ont jamais été liés au volume que l’on peut télécharger et au prix de l’abonnement, mais à ce que l’internaute peut faire au sein d’un même accès : tout ce que permet le protocole TPC/IP. Or la fin de l’internet illimité, qui est la mesure spectaculaire de surface, pourrait s’accompagner de la fin de l’internet tout court.
La fin de l’internet illimité, ou la fin d’internet ?
En interdisant l’utilisation abusive de l’expression « internet illimité », le gouvernement introduit subrepticement l’idée d’un internet limité, pas seulement en débit. Il pourra l’être en volume, mais il pourra aussi et surtout l’être en terme de fonctionnalités. C’est un aspect largement ignoré du document révélé vendredi par Owni, alors qu’il est à nos yeux beaucoup plus essentiel. A côté de la limitation par plafonnement de bande passante, le tableau préparé par la Fédération Française des Télécoms (FFT) ouvre la porte au blocage d’au moins trois types de protocoles : VoIP, P2P, Newsgroups.
Les prochains forfaits des opérateurs pourraient prévoir un « réservoir internet » limité, qui serait consommé jusqu’à épuisement quelques soient les services utilisés, et qui leur permettrait de continuer à poser l’étiquette « internet » dans leurs publicités. Ces forfaits pourraient alors s’accompagner d’un « réservoir services » complémentaires, qui lui serait illimité en consommation, mais pour une partie seulement des services.
On imagine ainsi facilement (par exemple) Orange proposer un forfait « Internet » de 20 Go de données téléchargeables, avec accès illimité à ses filiales Deezer, Dailymotion, Skyrock, Voilà.fr, etc., et une consommation illimitée sur ses services de VOD et de SVOD. Les 20 Go seront ainsi consommés sur tous les services « Internet » qui ne sont pas affiliés à Orange, ce qui incitera l’abonné à privilégier plutôt ceux qui rémunèrent l’opérateur. Où comment enterrer Internet sans en avoir l’air.
Vous avez lu 0 articles sur Numerama ce mois-ci
Tout le monde n'a pas les moyens de payer pour l'information.
C'est pourquoi nous maintenons notre journalisme ouvert à tous.
Mais si vous le pouvez,
voici trois bonnes raisons de soutenir notre travail :
- 1 Numerama+ contribue à offrir une expérience gratuite à tous les lecteurs de Numerama.
- 2 Vous profiterez d'une lecture sans publicité, de nombreuses fonctions avancées de lecture et des contenus exclusifs.
- 3 Aider Numerama dans sa mission : comprendre le présent pour anticiper l'avenir.
Si vous croyez en un web gratuit et à une information de qualité accessible au plus grand nombre, rejoignez Numerama+.
Abonnez-vous gratuitement à Artificielles, notre newsletter sur l’IA, conçue par des IA, vérifiée par Numerama !