La souveraineté nationale des États en matière d’informatique dématérialisée est devenue une question cruciale avec le développement du cloud computing. La France s’est entourée de trois grandes entreprises françaises pour concevoir sa propre infrastructure. Elle mobilise pour cela pas moins de 135 millions d’euros.

Face aux investissements massifs effectués quotidiennement par les grandes sociétés américaines dans l’informatique dématérialisée, les ambitions françaises dans ce domaine se précisent enfin. Alors que l’hébergement des données à distance (cloud computing) est une tendance lourde depuis plusieurs mois, la France entend peser sur ce marché en pleine effervescence à travers l’émergence d’un acteur national de premier plan.

C’est le projet Andromède. Son but ? Contrebalancer le poids considérable des États-Unis dans l’informatique en nuage en mettant au point une solution nationale, ayant une vocation européenne, afin d’éviter que des données sensibles soient systématiquement hébergées de l’autre côté de l’Atlantique. C’est une question de souveraineté nationale, et la France n’est pas le seul pays à y penser.

Il faut en effet indiquer que l’application du Patriot Act, une loi anti-terroriste née suite aux attentats du 11 Septembre, permet aux autorités américaines d’inspecter toute donnée hébergée par une entreprise américaine, même lorsque les serveurs sont physiquement localisés en dehors des États-Unis. Malgré une amitié vieille de plusieurs siècles, il est inacceptable pour la France d’être aussi dépendante du bon vouloir américain.

En conséquence, un protocole d’accord a été signé en juillet dernier entre l’État et trois grandes entreprises françaises : l’opérateur de télécommunications Orange, le groupe électronique Thales et l’éditeur de logiciels Dassault Systèmes. La France investira 135 millions d’euros dans ce projet, Orange et Dassault 60 millions d’euros chacun et Thales 30 millions, rapporte le quotidien Les Échos.

« Le risque est réel de laisser à des acteurs non européens l’accès aux données stratégiques des entreprises françaises et européennes et de leur transférer la responsabilité de la sécurité et de la fiabilité de nos systèmes » met notamment en garde les documents du protocole d’accord, cité par le journal. Andromède devra donc « concevoir, bâtir et opérer une infrastructure de centrale numérique de confiance et sécurisée, au service de la compétitivité de l’économie et de la société française, à vocation européenne« .

Au total, le projet Andromède disposera d’une somme de 285 millions d’euros pour voir le jour. Chaque participant aura des droits de vote correspondant à la hauteur de l’investissement réalisé. En conséquence, l’État disposera d’un tiers des voix. Pour éviter tout risque et préserver la souveraineté de l’Hexagone, les données devront être stockées sur des infrastructures européennes situées sur le Vieux Continent.

Dans ce domaine, la France pourra compter sur le concours de la Commission européenne. Cette dernière avait jeté les bases d’une réflexion sur la régulation de l’informatique en nuage. La commissaire en charge du dossier, Neelie Kroes, avait expliqué de réglementer cette activité au niveau « de la protection des données et de la vie privée« , et de fixer « des règles claires pour l’allocation de la juridiction, la responsabilité, et la protection des consommateurs« .

Une consultation publique a suivi, dont l’un des points essentiels traitait des « questions de protection des données et de responsabilité, notamment dans des situations transfrontalières« . Précisons enfin qu’avec les investissements d’avenir, le gouvernement a mobilisé 2,25 milliards d’euros pour les « usages, services et contenus numériques innovants« , ce qui concerne le « développement de l’informatique en nuage (cloud computing) » et la « sécurité et résilience des réseaux« .

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