Alors que l’avenir de la neutralité du net est de plus en plus incertain, que ce soit en France ou à l’échelle européenne, plusieurs acteurs de la société civile ont décidé de riposter à travers une initiative visant justement à démontrer l’impérieuse nécessité de légiférer afin de sanctuariser ce principe qui, non content de garantir l’égalité de traitement de l’ensemble des flux circulant sur Internet, est véritablement le fondement du réseau des réseaux.
Baptisée Respecte Mon Net, cette plate-forme propose de recenser les opérateurs de télécommunications qui restreignent d’une façon ou d’une autre l’accès à Internet. Pour cela, le site offre à l’internaute la possibilité de signaler un cas en renseignant son pays, son opérateur, son type de contrat et s’il s’agit d’une connexion filaire ou mobile. L’internaute peut également confirmer une restriction s’il se retrouve dans un cas déjà renseigné.
Déjà des cas recensés
Tous les abus sont ensuite recensés dans un tableau. Pour le cas de la France, il y a quatorze signalements. Les quatre principaux fournisseurs d’accès à Internet sont concernés : Orange (2 cas), SFR (6 cas), Free (4 cas) et Bouygues Télécom (2 cas). Les blocages supposés concernent des connexions fixes et mobiles et touchent la voix sur IP (VoIP) et la connectivité Internet.
Comment savoir si un fournisseur d’accès à Internet manipule le trafic Internet ? Pour le savoir, le site propose une liste d’outils permettant de faire le test sous Windows, Mac OS X, Ubuntu (GNU/Linux) ou depuis un navigateur, via le langage Java. Le site propose aussi des outils spécifiquement pensés pour tester sa connexion depuis un terminal mobile, ainsi que divers logiciels et sites dédiés à la mesure de la qualité de la connexion.
Exclusion des incidents et des fluctuations de débit
Le site rappelle toutefois que l’outil n’est pas destiné à recenser les incidents ponctuels. Il peut arriver que les FAI soient confrontés à un souci qui empêche l’accès normal à certains services (navigation en ligne, webmail…). Il faut souvent patienter pour que tout rentre dans l’ordre et ne pas hésiter à signaler l’incident à l’opérateur. De plus, la plate-forme n’est pas le lieu pour se plaindre des fluctuations de débit.
« L’Internet haut-débit est un service dit ‘best effort’, ce qui signifie que la bande passante est partagée entre de nombreux utilisateurs et que la performance de la connexion varie (notamment dans les zones urbaines denses). Par exemple, si vous avez souscrit à une offre d’accès à 8 Mbps, mais que votre ligne n’est configurée que pour un débit de 2 Mbps, il n’est pas surprenant que votre accès offre concrètement des vitesses n’allant que de 1 à 1,5 Mbps » est-il expliqué.
La Commission européenne sera alertée
Les informations récoltées par Respecte Mon Net seront ensuite transmises à la Commission européenne et aux différentes autorités nationales concernées. L’objectif est de leur faire prendre conscience des enjeux de la neutralité du net en leur amenant des cas concrets de restriction d’accès. Le collectif derrière ce projet espère que des actions précises surviendront alors.
« Le législateur européen fait la sourde oreille sur ce problème depuis plus de deux ans. Le rapport de la commissaire européenne Neelie Kroes sur le sujet prétend qu’il n’y a pas de preuves quant à la nécessité de protéger dans la loi la neutralité du Net. Une telle approche attentiste est choquante quand on voit la réalité des pratiques de gestion du trafic des opérateurs, et leur impact sur la liberté de communication en ligne, la concurrence et l’ensemble de l’économie numérique » a ainsi déclaré Jérémie Zimmermann, porte-parole de la Quadrature du Net.
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