Le décalage a de quoi étonner. Tandis que la France vient d’être classée pour la deuxième année consécutive dans la catégorie des pays sous surveillance par RSF, à cause notamment de son approche répressive de la protection du droit d’auteur, de son manque d’engagement en faveur de la neutralité du net et de sa position particulière sur le marché de la surveillance en ligne, la Tunisie prend un tout autre chemin.
Le pays a en effet décrété le 13 mars « Journée nationale de la cyber-liberté », rendant ainsi hommage à Zouhair Yahyaoui, un activiste tunisien décédé le 13 mars 2005 à l’âge de 37 ans. Récipiendaire du premier prix Cyberliberté en juillet 2003, Zouhair Yahyaoui avait été arrêté le 4 juin 2002 et condamné à deux ans de prison pour « propagation de fausses nouvelles » par la cour d’appel de Tunis.
« Zouhair Yahyaoui écrivait sous le pseudonyme « Ettounsi » qui signifie le Tunisien en arabe. Il avait fondé le site tunezine en juillet 2001 pour diffuser notamment des informations sur l’état des libertés en Tunisie. Il publiait également en ligne des documents de l’opposition. Il avait été le premier à diffuser la lettre dénonçant le système judiciaire du pays adressée au président de la République par le juge Mokhtar Yahyaoui » rappelle RSF.
Si le Printemps arabe a permis à la Tunisie de se débarrasser du système Ben Ali, qui n’était rien d’autre qu’une dictature longue de 23 ans, il reste encore un long chemin à parcourir pour que le pays se libère définitivement de ses chaînes. Si Reporters Sans Frontières appelle à la vigilance, la liberté d’information et de communication étant fragile à préserver, les choses se sont un peu améliorées ces derniers mois.
En premier lieu, RSF a révisé la position de la Tunisie dans son classement des pays les plus défavorables à Internet. Auparavant listée dans la catégorie des ennemis du net, la Tunisie nouvelle est désormais dans celle des pays sous surveillance. Nous sommes certes assez loin des standards européens, mais c’est une tendance qui a le mérite d’être positive.
Il faut aussi noter la reconnaissance officielle par l’État du Parti pirate tunisien comme formation politique. Avec ce feu vert des autorités, les membres du mouvement vont pouvoir non seulement concourir aux prochaines élections mais surtout faire avancer leurs idées sur la liberté d’information et de communication au sein de la population.
Il faut enfin remarquer la décision de la Cour de cassation tunisienne, qui a cassé l’arrêt de la cour d’appel de Tunis. Celle-ci avait ordonné la censure des sites pornographiques. Cela ne résout pas encore la question du filtrage et du blocage en Tunisie, mais « en attendant le principe demeure la liberté d’expression et d’accès aux contenus » s’est enthousiasmé l’avocat du principal FAI local.
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