Pour que l’accord commercial anti-contrefaçon (ACTA) entre en vigueur dans l’Union européenne, il faut que celui-ci soit approuvé par les eurodéputés lors d’un vote en séance plénière. Sans le consentement du pouvoir législatif communautaire, l’Union européenne ne peut pas ratifier le projet de traité international. Autrement dit, un vote négatif signera l’acte de décès d’ACTA.
Favorable à l’accord commercial depuis le début, la Commission européenne s’emploie depuis quelques semaines à réunir les meilleures conditions pour obtenir un vote positif au Parlement. Et visiblement, plus la date de la séance plénière est lointaine, plus les chances d’une adoption par les députés européens sont grandes. Un vote dans les prochaines semaines ou les prochains mois serait très défavorable.
Pour cette raison, et parce que la pression médiatique et populaire sera moins vive dans quelques mois, la Commission européenne vient de demander aux eurodéputés de repousser leur vote prévu avant l’été sur l’ACTA. Selon l’AFP, les membres de l’exécutif du Vieux Continent souhaitent que la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) rende d’abord son avis sur la compatibilité de l’ACTA avec le droit communautaire.
« Il s’agit d’une contribution importante au débat public et démocratique européen » a commenté Karel De Gucht, commissaire en charge du commerce. Cette référence au débat public et démocratique est une déclaration qui ne manque pas de piquant, lorsque l’on sait que l’ACTA a été négocié pendant des années derrière des portes closes par des individus n’ayant jamais été élus.
Karel De Gucht a poursuivi en émettant « ‘espoir que le Parlement européen respectera la Cour européenne de justice et attendra son opinion avant de déterminer sa propre position sur ACTA« . Sauf que le problème posé par l’accord n’est pas sa compatibilité avec le droit communautaire ou le respect des libertés fondamentales, mais ce qu’il prépare pour l’avenir, notamment avec la création du comité ACTA.
Cette nouvelle institution internationale pourra décider d’amender l’accord sans passer par les parlements nationaux. Avec le comité ACTA, le processus démocratique est tout simplement mis hors-jeu. De nouvelles règles négociées entre diplomates pourraient ainsi voir le jour, en plus de l’encouragement envers les initiatives privées pour lutter contre la contrefaçon, sans le contrôle de l’ordre judiciaire.
Dans la mesure où la Cour de justice de l’Union européenne va mettre au minimum plusieurs semaines (pour ne pas dire mois) avant de rendre son avis, il est de l’intérêt de l’exécutif du Vieux Continent que les eurodéputés attendent le verdict de l’institution judiciaire. D’autant que l’AFP indique que la question posée est « très large« , portant sur les traités communautaires et notamment la charte des droits fondamentaux.
Le Parlement européen répondra-t-il favorablement à l’invitation de la Commission ? Rien n’est moins sûr. Les membres de la commission INTA, qui est l’instance de référence pour la validation de l’accord au niveau du Parlement européen, ont refusé la proposition du rapporteur David Martin consistant à déférer le texte devant la CJUE au nom du Parlement, en marge de la saisine de la Commission.
Le bras de fer autour du calendrier ACTA se poursuit.
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