Mardi matin, nous commentions les résultats de l’étude sur les finances du piratage commandée par l’Hadopi à l’IDATE, dont nous trouvions les hypothèses extrêmement généreuses.
Elles concluaient en effet que sur le seul marché français, les services et sites de contenus en streaming et téléchargement direct (DDL) rapportaient entre 51 et 72,5 millions d’euros sur un an, et que « les plus gros sites de streaming pouvaient générer près de 2 à 3 millions d’euros par mois en France« , soit entre 24 et 36 millions d’euros annuels. Ces chiffres nous avaient fait bondir par leur surréalisme. Nous faisions remarquer en nous basant sur le dossier d’accusation monté par le FBI que sur l’ensemble du globe, entre 2005 et 2011, le leader du marché MegaUpload/MegaVideo n’avait généré « que » 175 millions de dollars, soit 133 millions d’euros. Et que dès lors, si comme l’indique l’IDATE le marché français représentait 10 % des clients de MU/MV, le plus gros service de contenus n’a logiquement gagné « que » 13,3 millions d’euros en France entre 2005 et 2011. Même en considérant que les 13,3 millions d’euros n’auraient été gagnés que sur l’année 2011, c’est très largement en dessous de l’hypothèse basse des 24 millions d’euros par an affichée par l’IDATE pour « les plus gros sites de streaming ».
Confronté à cette contradiction par France 24, l’IDATE a cru bon d’affirmer que nous ne savions pas lire. « Numerama confond recettes et profits de Megaupload« , affirme à nos confrères Gilles Fontaine, co-directeur de l’Idate et co-auteur du rapport pour l’Hadopi. Il aurait expliqué à France 24 « que le FBI n’a fourni que les profits (et non le chiffre d’affaires) qui seraient bien plus élevés« .
Remercions Gilles Fontaine pour cette leçon de comptabilité. Et démontrons-lui qu’il se trompe.
L’acte d’accusation très précis monté par le FBI, que nous avions décortiqué, parle bien de chiffre d’affaires et non de bénéfices.
Certes, la toute première fois que le document de 72 pages parle des 175 millions de dollars, c’est pour employer (en page 2) le mot « income », qui en anglais peut exprimer tout aussi bien les recettes que le bénéfice. Peut-être Gilles Fontaine n’a-t-il pas dépassé cette page 2, mais il aurait dû.
Sur la page suivante, il est détaillé que « les abonnements collectés durant l’existence de [MegaUpload/MegaVideo] auprès des utilisateurs premium sont estimés à plus de 150 millions de dollars« , et que « la publicité en ligne sur MegaUpload.com et ses sites associés (…) a généré plus de 25 millions de dollars supplémentaires« . En page 28, il est écrit que « entre septembre 2005 et la date de cette mise en examen (janvier 2012, ndlr), les défendeurs ont collectivement reçu plus de 175 millions de dollars de publicités et d’abonnements« . Il n’est pas ici question de bénéfice (diviser entre publicités et abonnements n’aurait aucun sens comptable s’agissant de la même activité), mais bien de chiffre d’affaires.
Faut-il aller plus loin ? Allons-y.
En page 19, l’acte d’accusation dit que le compte PayPal de MegaUpload, qui servait à encaisser les paiements des abonnés et à payer ses principaux fournisseurs, a « reçu plus de 110 millions de dollars » entre le 25 novembre 2006 et juillet 2011. Il s’agit bien d’encaissements, donc de chiffre d’affaires. Il ajoute que Moneybookers qui recevait aussi des paiements a encaissé 5 millions de dollars. Que la régie publicitaire AdBrite a versé 840 000 dollars. Que PartyGaming a versé 3 millions de dollars.
Quoi que soient les fantasmes de l’IDATE et/ou de l’Hadopi, nous sommes très loin d’une activité qui aurait dégagé 175 millions de bénéfices.
Remercions tout de même Gilles Fontaine pour cette tentative de discréditer Numerama. Elle va certainement contribuer à renforcer le crédit de l’étude de l’IDATE… Ou pas.
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