Lorsque le législateur a créé la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi), il a dissous dans le même temps l’ancienne Autorité de Régulation des Mesures Techniques (ARMT). Cette dernière, créée par la loi DADVSI, avait pour mission d’assurer un difficile équilibre entre la protection des DRM qui visent à éviter que les contenus vendus puissent être copiés librement, et les droits du public à bénéficier d’un certain nombre d’exceptions au droit d’auteur, en particulier de copie privée et d’interopérabilité.
C’est l’Hadopi qui a hérité des pouvoirs de l’ARMT, dans une sorte de contre-balancement discret de son rôle premier de machine à distribuer des avertissements aux pirates : certes, il faut sanctionner les internautes qui ne jouent pas le jeu de la légalité, mais il faut alors sanctionner les industriels qui ne jouent pas le jeu du respect des droits des consommateurs.
Sans doute le législateur et le gouvernement pensaient-ils alors que les fonctions de régulateur des DRM de l’Hadopi resteraient purement théoriques, puisque l’ancienne ARMT avait présenté un bilan vierge. Mais c’était sans compter sur VideoLAN, l’éditeur du logiciel de lecture multimédia VLC, qui a saisi l’Hadopi au début du mois d’avril pour obtenir le droit de contourner les verrous des Blu-Ray pour permettre la lecture des supports vidéo, en particulier sous Linux où il n’existe pas de logiciel autorisé. Avec de véritables arguments de fond pour obtenir satisfaction.
Sauf que l’Hadopi joue la montre, à quelques mois de sa probable ou néanmoins éventuelle dissolution. Elle voudrait mettre le dossier sous le tapis en espérant ne pas faire jurisprudence qu’elle ne s’y prendrait pas autrement (via Pcinpact) :
En mai, via Twitter, Éric Walter nous expliquait que le dossier était en » phase d’instruction par les services avant une première présentation au collège « , précisant qu’une première présentation pourrait être faite au collège avant la fin juin. Le secrétaire général de la Hadopi nous indique qu’aucune présentation n’a eu lieu à ce jour. » Le programme du collège est chargé. Néanmoins, nous avons achevé une pré analyse juridique complète pour la transmettre au collège dans une dizaine de jours « . Et ensuite ? » Je ne veux pas parler à sa place, mais cela veut dire que le collège va commencer à en discuter à la rentrée « . Une discussion qui va commencer à la rentrée et qui pourra ensuite s’étirer dans le temps.
Le Code de la propriété intellectuelle n’encadre cette procédure pour avis dans aucun délai. Sauf si VLC décide d’opter pour une procédure précontentieuse, libre à la Hadopi d’y consacrer encore des mois et des mois si elle l’estime nécessaire.
« Le programme du collège est chargé« , affirme Eric Walter pour justifier le manque d’entrain de l’Hadopi à se saisir du sujet. Il suffit de regarder les délibération et relevés de conclusion du collège de l’Hadopi pour s’en convaincre. Si l’on en croit les documents, en 2012 le collège s’est réuni deux fois et a publié 9 délibérations. Toutes portent exclusivement sur l’attribution du label PUR, d’une absolue priorité par rapport au droit à l’interopérabilité, à des plateformes de contenus culturels à la demande.
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