Suite à la panne nationale qui a affecté le réseau mobile d'Orange vendredi dernier, la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale va auditionner ce mercredi Jean-Ludovic Silicani, le président l'Arcep, et Stéphane Richard, le PDG d'Orange. Les députés pourront notamment questionner l'opérateur historique et le régulateur sur les mesures envisagées pour éviter qu'un tel incident ne se reproduise plus.
La coupure des télécommunications ne sera pas le seul sujet abordé lors de ces audiences. Martin Bouygues le sait. Deux jours avant, le directeur général du groupe Bouygues Télécom s'est adressé à l'ensemble des députés dans une lettre (.pdf), repérée par Électron Libre, pour les informer de la "spirale autodestructrice" dans laquelle se trouve le secteur des télécommunications en France.
"Si je me permets de m'adresser directement à vous aujourd'hui, c'est pour vous transmettre ma conviction qu'il est nécessaire et possible de refaire de ce secteur économique essentiel le modèle de croissance porteur d'emplois qu'il n'aurait jamais dû cesser d'être", écrit Martin Bouygues, en rappelant que 556 emplois seront supprimés d'ici la fin de l'année… à cause de Free Mobile.
Martin Bouygues veut limiter l'itinérance de Free Mobile
Il est néanmoins possible, selon lui, de relancer ce cercle vertueux par "quelques décisions simples et efficaces". Deux propositions sont avancées, et chacune concerne directement le quatrième opérateur. En premier lieu, le contrat d'itinérance 3G passé entre Free Mobile et Orange ne doit pas être prolongé au-delà de 2018 et en second lieu, aucun accord similaire ne doit être conclu dans la 4G.
"La principale explication du déséquilibre actuel du marché mobile réside dans le fait que le quatrième entrant est le premier et le seul opérateur en France à bénéficier, grâce au contrat d'itinérance 3G qui le lie à Orange, de la possibilité de n'investir dans son réseau mobile que là où il est sûr que c'est rentable. […] Cet opérateur n'a donc pas les mêmes contraintes d'investissement que ses trois concurrents".
Et Martin Bouygues chiffre cet écart. Cette année, Free Mobile a nettement moins investi que son groupe "alors qu'il aurait dû être en phase d'investissement intense". Martin Bouygues cite le chiffre de 142 millions d'euros pour le quatrième opérateur et le met en balance avec les montants investis par son groupe : près de 600 millions d'euros "pour simplement le compléter et le moderniser".
Free Mobile ne doit pas profiter de la 4G en itinérance
Concernant la 4G, un accord d'itinérance passé entre Orange et Free Mobile "aurait pour conséquence de distordre encore plus la concurrence et d'aggraver très fortement le déséquilibre actuel", dans la mesure où les autres opérateurs engagent "plusieurs centaines de millions d'euros d'investissements". Sauf à imaginer une séparation fonctionnelle de France Télécom et d'Orange, avec une structure gérant les réseaux et une société commerciale lambda.
L'arrivée d'un quatrième opérateur de téléphonie mobile n'a jamais enthousiasmé Bouygues Télécom, pas plus qu'elle n'a enchanté les deux autres acteurs du secteur (Orange et SFR). Mais l'entreprise de Martin Bouygues s'est montrée particulièrement active pour empêcher Free Mobile d'obtenir une licence 3G, en évoquant un risque pour l'emploi et en explorant toutes les voies judiciaires possibles.
"Si le gouvernement autorise un nouvel entrant à venir faire de l'ultra-low-cost dans le mobile, il prend une lourde responsabilité. À terme, une guerre des prix peut provoquer de 10 000 à 30 000 pertes d'emplois chez les opérateurs", avait-il lancé.
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