Plus gros demandeur de retraits de résultats de recherche auprès de Google, Microsoft a la gâchette facile en automatisant ses plaintes basées sur une prétendue violation de droits d'auteur, au risque de générer d'évidents faux-positifs. Les dommages étaient jusqu'à présent limités, mais le nouvel algorithme de Google prend désormais en compte le nombre de plaintes reçues pour sanctionner le référencement d'un site. Et il présume que le site accusé est coupable tant qu'il n'a pas démontré son innocence…

Google a annoncé il y a un peu plus d'une semaine que l'algorithme de son moteur de recherche allait évoluer pour sanctionner les sites qui reçoivent des "demandes valides de retraits de contenus pour violation de droits d'auteur". L'objectif est de plaire aux industries de la musique ou du cinéma qui ne veulent plus voir les sites pirates dominer les résultats lorsque des internautes recherchent des noms de films ou d'albums. Mais tout le problème du dispositif est qu'il repose sur la même idée de présomption de culpabilité que celle que Google applique déjà sur YouTube. Par principe, la firme de Mountain View estime que les ayants droit qui portent réclamation ont raison, et que les personnes accusées doivent prouver leur innocence.

Ainsi, Google considère que les "demandes de retraits de contenus pour violation de droits d'auteur" sont "valides" dès lors qu'elles n'ont fait l'objet d'aucune contestation. Le risque, évident, est de noyer des sites internet sous de fausses plaintes en contrefaçon, pour les faire chuter dans les classements. Il est beaucoup plus facile d'automatiser des plaintes que d'automatiser des défenses (gageons que des experts du "black hat SEO" tenteront rapidement ces techniques, en masquant au mieux l'origine des plaintes pour éviter les représailles).

Accusé ! Oui, mais de quoi ?

Mais il est encore plus dur de se défendre quand on ne sait pas de quoi l'on est accusé. Le site Ghacks raconte ainsi qu'il a reçu notification d'une plainte en contrefaçon prise en compte par Google, concernant cette page. Il s'agit d'une simple page listant les articles parlant de Windows 8 RTM, sans aucun contenu à télécharger, ni aucun texte dupliqué illégalement. Mais Microsoft a demandé à Google de retirer cette page de l'index, et le moteur de recherche s'est exécuté, considérant (présomption de culpabilité oblige) que la demande était légale. La demande de Microsoft sera prise en compte pour sanctionner Ghacks dans son référencement – s'agissant d'une seule page, la sanction devrait être minime, mais qu'importe.

Google n'a pas informé Ghacks du motif de la plainte de Microsoft, et renvoie pour les détails vers une page du site ChillingEffects, sur laquelle il est écrit (en tout cas c'était toujours le cas ce lundi matin) que "la mise en demeure ou la menace judiciaire que vous avez demandée n'est pas encore disponible". Impossible pour Ghacks de savoir  de quoi il est accusé, et donc impossible pour lui de se défendre. Non seulement il y a présomption de culpabilité, mais il y a en plus refus d'accès aux éléments basiques de la plainte. C'est la justice privée (si l'on peut encore l'appeler "justice") dans ce qu'elle a de pire.

Très probablement, Microsoft a automatisé sa plainte, parce que l'on trouve sur la page les mots "Leaked" et "Windows 8" ensemble, ce qui laisse penser que l'on peut y trouver une copie illégale du nouveau système d'exploitation de Microsoft. Alors qu'il s'agit en fait de "Leaked Microsoft Roadmap Reveals Windows 8 Release Dates", c'est-à-dire d'un article relatant une fuite sur les dates de sortie de Windows 8. Rien de répréhensible au regard du droit d'auteur.

Lorsque l'on regarde le Transparency Report de Google, on constate que l'organisation qui a le plus demandé de retraits de contenus à Google est Marketly, qui a demandé le retrait de plus de 3 millions d'URL sur plus de 22 000 sites. Or il s'agit d'une société fondée par un ancien ingénieur de Microsoft, qui semble travailler exclusivement pour ce dernier. Dans un article publié en mai dernier, nous avions calculé que Microsoft était responsable de 43 % des demandes de retraits d'URL sur Google

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