L'idylle se poursuit entre les ayants droit et Trident Media Guard (TMG), une société nantaise missionnée pour collecter les adresses IP des internautes suspectés d'enfreindre le droit d'auteur sur les réseaux peer-to-peer. Désignée en 2010 pour surveiller les échanges illégaux de contenus sur différents réseaux (BitTorrent, eMule, Gnutella…), l'entreprise poursuivra ses activités au moins jusqu'en 2014.
Le magazine Édition Multimédi@ signale dans son dernier numéro que les ayants droit impliqués dans la riposte graduée sont disposés à renouveler leur confiance pour deux ans. "Ils viennent de se mettre d'accord afin de renouveler pour deux ans leurs contrats respectifs avec TMG", a glissé Benoît Solignac-Lecompte, adjoint du département des droits phonographiques et numériques de la SACEM.
Pour avoir le droit de collecter les adresses IP sur les réseaux P2P, TMG doit obtenir impérativement l'autorisation de la CNIL. Chaque organisation d'ayants droit doit en faire la demande auprès de la Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés, afin de pouvoir faire appel aux services de la société nantaise et transmettre les adresses IP aux services de la Haute Autorité.
En juin 2010, la CNIL a délivré des autorisations à la SACEM (Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique), la SCPP (Société civile des producteurs phonographiques), la SPPF (Société civile des producteurs de phonogrammes de France), l'ALPA (Association de lutte contre la piraterie audiovisuelle) et la SDRM (Société pour l'administration du droit de reproduction mécanique des auteurs, compositeurs et éditeurs).
Vers une extension du rôle de TMG
Le renouvellement du contrat avec TMG pourrait aussi être l'occasion d'élargir l'action des ayants droit. "Si la mission de l'Hadopi évoluait vers d'autres formes d'utilisation en ligne et non autorisés, comme par exemple le streaming ou le téléchargement direct (DDL), nous demanderions alors à notre prestataire externe (TMG, ndlr) de s'adapter à cette nouvelle mission", a poursuivi l'adjoint de la SACEM.
L'an dernier, la société TMG qui collecte les adresses IP sur les réseaux P2P a affirmé être prête à intervenir contre le streaming et le téléchargement direct. Mais il faudra que la CNIL délivre de nouvelles autorisations . En parallèle, l'Hadopi a développé en interne depuis de nombreux mois un protocole d'étude des réseaux pour quantifier autant que possible ces pratiques hors du P2P.
À l'heure actuelle, la Haute Autorité ne peut s'attaquer qu'aux seuls échanges par P2P, qui sont les seuls qui permettent l'interception des adresses IP des internautes. C'est pour cette raison que juridiquement, le décret Hadopi ne vise que le P2P, et rien d'autre. Cependant, la question du streaming et du téléchargement direct reste omniprésente.
Pendant son audition devant les parlementaires, Aurélie Filippetti a dit qu'il fallait "permettre à la Hadopi d’assurer ses missions, en particulier sur l'évaluation des pratiques". Au moment où l'Hadopi prévoit d'augmenter de près de 40 % le volume des avertissements qu'elle enverra aux abonnés à Internet dont l'adresse IP a été découverte sur les réseaux P2P, la ministre a fixé le cap.
Elle tient à ce que la mission Lescure permette de donner à l'Hadopi les moyens de lutter contre le streaming et le téléchargement direct. Plusieurs pistes sont envisagées : cela va de la rupture des flux financiers – une idée qui intéresse de près la Haute Autorité -, au déréférencement des plates-formes les plus utilisées pour le piratage, en accord avec les moteurs de recherche ou sur ordre de la justice.
TMG pourra-t-il mener de front ces différentes batailles ? Interrogé par Édition Multimédi@, un membre de la Haute Autorité avait indiqué que l'entreprise nantaise "n'est pas à la pointe techniquement". Or, selon la présidente de la Commission de protection des droits, Mirelle Imbert Quaretta, la Hadopi compte rendre son rapport sur le streaming et le téléchargement direct le mois prochain.
Les ayants droit du jeux vidéo veulent en être
En tout cas, d'autres ayants droit comptent bien se mener campagne contre les pirates sur la toile. Le SELL (Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs) a préparé son dossier pour obtenir une autorisation de la CNIL visant à collecter les adresses IP des internautes suspectés de téléchargement illicite. Les mails d'avertissement envoyés par la Hadopi concernant les jeux vidéo piratés sont donc pour bientôt.
Et tant pis si l'ancien président du SELL, Jean-Claude Larue, estimait que la collecte des adresses IP coûte trop cher. Le syndicat l'avait chiffrée à 420 000 euros par an pour surveiller les téléchargements de 100 jeux vidéo et collecter 25 000 adresses IP par jour.
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