Pour qui a l'habitude de télécharger des fichiers piratés, la conclusion ne sera pas une surprise. Selon une étude menée par des chercheurs des Universités de Boston, de Santa Barbara et de Vienne, dont les grandes lignes sont rapportées par TorrentFreak, les ayants droit perdent actuellement la bataille qu'ils livrent avec les uploaders de fichiers piratés. Pire, la fermeture de MegaUpload il y a un an (qui a fait exploser le P2P) n'aurait eu pour effet que de complexifier encore davantage la lutte contre la disponibilité des oeuvres copiées illégalement, en encourageant les pirates à multiplier le nombre et la diversité des serveurs sur lesquelles ils envoient leurs fichiers.
Les chercheurs ont observé des milliers de fichiers uploadés sur les services d'hébergement les plus populaires, tels que Uploaded, Wupload, HotFile, RapidShare et RapidGator, et démontré que les demandes de retraits de fichiers reçues et traitées par ces derniers n'étaient d'aucune efficacité. Même si leur nombre n'a jamais été aussi élevé, Google recevait à lui seul plus de 3 millions de demandes de suppressions de liens par semaine.
Ces demandes de retraits de fichiers, respectées par les hébergeurs au titre du DMCA (l'équivalent américaine de la LCEN française), n'ont aucune efficacité contre les pirates qui sont désormais organisés pour proposer un nouveau lien de téléchargement dès qu'un premier lien a été supprimé. "Il y a un jeu du chat et de la souris entre les uploaders et les ayants droit (…). Actuellement, ce jeu semble tourner en faveur des nombreux pirates qui fournissent bien davantage de contenus que ceux dont les ayants droit font tomber".
La seule solution stratégique : proposer une offre légale attractive
C'est ce qui fait que s'intensifie chez les ayants droit un lobbying visant à modifier la loi pour ne plus avoir un système dit de "notice and takedown" (supprimer les contenus attachés à un lien dont l'illégalité a été notifiée à l'hébergeur), mais à un système de "notice and stay down", qui vise à bloquer la possibilité de ré-uploader un contenu qui a déjà été notifié comme illégal. Et donc de filtrer les fichiers que les utilisateurs demandent à uploader.
Selon les chercheurs, la seule solution viable serait toutefois de s'attaquer aux flux financiers, pour assécher les sites pirates qui n'auraient plus accès aux régies publicitaires ou aux plateformes de paiement. Néanmoins, comme nous l'avions expliqué pour dire pourquoi la mission Lescure est vouée à l'échec, un tel raisonnement part du principe que le piratage naît de l'offre, alors que c'est l'offre qui naît de la demande. Si les pirates ne trouvent plus les contenus qu'ils demandent sur les sites qui font une exploitation commerciale du piratage, ils retournent à des solutions non commerciales comme l'étaient eMule, l'IRC, les newsgroups ou les serveurs FTP à leurs heures de gloire.
Finalement, l'étude ne dit pas autre chose lorsqu'elle conseille aux ayants droit de "suivre une stratégie complémentaire pour réduire la demande de contenus piratés, par exemple en fournissant des offres légales qui sont plus attractives pour les consommateurs que les contenus piratés". Ce qui n'est pas un vain voeux. Il n'y a qu'à regarder le succès de Hulu aux Etats-Unis pour s'en convaincre.
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