Martin Bouygues n'a jamais supporté l'idée d'un quatrième opérateur de téléphonie mobile en France. Depuis le début, le chef d'entreprise s'est élevé contre l'arrivée de Free dans ce secteur en lançant un avertissement très clair : il y aura de lourdes conséquences pour l'emploi "si le gouvernement autorise un nouvel entrant à venir faire de l'ultra low-cost dans le mobile".
Très proche de Nicolas Sarkozy, Martin Bouygues avait plaidé sa cause auprès de l'ancien président. "Je me suis acheté un château, ce n'est pas pour laisser les romanichels venir sur les pelouses", lui avait-il lancé. Par la suite, Nicolas Sarkozy s'était déclaré "réservé" sur l'intérêt d'avoir un marché à quatre acteurs, tout semblant être fait pour dissuader, ou en tout cas retarder, l'arrivée de Free dans le mobile.
Trois ans plus tard, Martin Bouygues n'a toujours pas digéré l'arrivée de Free dans un secteur qu'il occupe lui-même depuis 1994. À chaque occasion ou presque, le chef d'entreprise tacle son rival. Il s'est opposé ainsi à la prolongation du contrat d'itinérance signé entre Orange et Free Mobile (celui-ci prendra fin en 2018), a exploré toutes les voies judiciaires possibles et s'en est pris au régulateur lui-même.
Aujourd'hui, Iliad pèse 9,46 milliards d'euros tandis que la capitalisation boursière de Bouygues n'atteint "que" 6,86 milliards d'euros. Terrible affront pour celui qui ne pouvait pas supporter la présence de "romanichels" squattant les pelouses de son "château". Mais la goutte d'eau qui a fait déborder le vase n'est pas celle là. C'est celle qui a été rapportée cette semaine par Marianne et dont Le Point s'en fait l'écho.
Selon l'hebdomadaire français, Xavier Niel aurait transmis une offre de rachat de Bouygues Télécom à Martin Bouygues en octobre 2012. Or, celle-ci aurait été d'un montant "trois fois inférieur" à la valeur de l'opérateur de télécommunications. Une proposition vue manifestement comme une insulte, puisque Martin Bouygues aurait affirmé préférer "crever" plutôt que de vendre l'opérateur à Xavier Niel.
En octobre, le PDG de SFR avait dit que "tout le monde discute avec tout le monde, les jeux sont ouverts". À l'époque, il était surtout question d'un rapprochement entre SFR et un autre acteur, puisque Vivendi – la maison-mère – songerait à se séparer de certaines activités. Un tel scénario entre Free et Bouygues semblait invraisemblable, vu les rapports conflictuels entre les dirigeants des deux groupes.
L'information rapportée par Marianne est toutefois surprenante, du fait des déclarations passées de Xavier Niel. "Le quatrième opérateur mobile n'est pas né de la seule rencontre de la volonté d'un entrepreneur avec la supposée myopie des pouvoirs publics. Le marché français du mobile était un oligopole" écrivait Xavier Niel dans une tribune en juin dernier. Une position qu'il a tenu depuis toujours.
Dès lors, il apparaît curieux que Xavier Niel, désireux de pourfendre l'oligopole de la téléphonie mobile, fasse des choix pouvant justement mener à en reconstituer un derrière. À moins que l'offre faite à Bouygues Télécom ne soit qu'une provocation supplémentaire, surtout qu'il serait question d'un montant franchement plus bas que la valeur réelle de Bouygues. Vu la personnalité de Xavier Niel, ce ne serait pas étonnant.
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