Il n'y a pas qu'en France que le fisc et les parlementaires se mobilisent pour tenter de mettre fin aux schémas d'évasion fiscale qui permettent aux grandes multinationales d'échapper à l'essentiel de leur imposition, en jouant à la fois sur la concurrence entre états et sur des montages à la légalité parfois douteuse. En Grande-Bretagne aussi, que l'on présente pourtant comme une terre de capitalisme dérégulé, le ton monte.
Alors que le président de Google Eric Shmidt s'était dit "très fier" d'échapper au fisc, ne voyant rien d'illégal ni d'immoral dans le fait de ne pas contribuer comme il le devrait à l'effort de redressement des finances publiques, un ancien employé de la société pourrait porter un coup dur au moteur de recherche. Le Sunday Times, dont les informations sont reprises par Techcrunch, révèle en effet que Barney Jones, un ancien collaborateur de Google qui a travaillé pour la firme de 2002 à 2006, s'est dit prêt à remettre au fisc britannique plus de 100 000 e-mails et documents censés démontrer non pas une simple évasion fiscale, mais bien une fraude fiscale (à l'époque, Google n'avait pas encore sa technologie de reconnaissance des e-mails problématiques).
En France aussi, l'Etat dit disposer de preuves
L'homme, qui est présenté par le quotidien britannique comme "un pieux chrétien et père de quatre enfants", aurait été choqué d'apprendre que Matt Brittin, l'ancien directeur de Google UK et actuel vice-président de Google, a affirmé la semaine dernière sous serment devant une commission parlementaire qu'il n'y avait aucun accord publicitaire signé par les équipes anglaises du moteur de recherche. Il s'agit d'un élément déterminant, puisque la Grande-Bretagne ne peut revendiquer une taxation sur son territoire que si la vente a bien eu lieu chez elle ; or Google affirme que toutes les négociations commerciales étaient finalisées à Dublin, en Irlande, ce qui lui permettait d'échapper à l'imposition britannique.
Barney Jones affirme détenir les preuves du contraire, qui montrent que Google aurait bien finalisé des accords commerciaux en Grande-Bretagne, même si formellement les documents sont établis au nom de Google Irlande. Interrogé par le Sunday Times, Google a dit ne pas vouloir commenter des documents qu'il n'avait pas vu, et réaffirme qu'il est dans la légalité en Grande-Bretagne. Il souligne aussi que les documents qu'auraient Barney Jones remontent à "une dizaine d'années ou plus".
En France aussi, Google est dans le collimateur de Bercy pour les mêmes raisons. L'ancien ministre du budget Jérôme Cahuzac avait affirmé avoir "la conviction tout à fait sincère que l'Etat dispose des éléments largement probants" pour démontrer "une activité domiciliée en France". Les services fiscaux s'étaient rendus directement dans les bureaux de Google France pour saisir des documents et interroger des employés, ce que la firme avait tenté sans succès de dénoncer en justice.
Selon la jurisprudence du Conseil d'Etat, dès lors que "les opérations commerciales (sont) réalisées matériellement à l'étranger, mais décidées, traitées et contrôlées directement en France", la société doit payer des impôts au Trésor Public français, au nom du "cycle commercial complet".
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