C'est une information qui va inévitablement faire jaser et produire son lot de commentaires. D'après une étude relayée par Business Insider, la "génération iPad" disposera d'un vocabulaire plus limité par rapport aux générations précédentes. En cause ? Le temps passé devant les écrans (télévision, ordinateur, smartphone, tablette…), au lieu d'enrichir son lexique personnel par la conversation.
"Nos cerveaux sont programmés pour apprendre de nouveaux mots lorsque nous les entendons dans une conversation avec autrui. Mais dans la mesure où les enfants apprennent de plus en plus à travers des dispositifs électroniques qu'en écoutant les autres, ils n'ont pas l'occasion d'entendre une grande variété de mots", explique le site, s'appuyant sur les travaux de Marco Catani, de l'institut de psychiatrie du King's College de Londres.
"Internet rend-il bête ?"
Les recherches menées par Marco Catani rappellent furieusement l'essai controversé de Nicholas Carr, baptisé "Internet rend-il bête ?". Derrière un titre volontairement provocateur, l'auteur a cherché à se pencher sur les effets des nouvelles technologies sur la capacité de concentration, de mémorisation et de réflexion des individus, obligeant le cerveau à se "recâbler" et à évacuer de l'information pour éviter la surcharge.
Toutefois, le livre de Nicholas Carr s'éloigne de l'étude de Marco Catani et observe que la lecture, nonobstant le support, a servi à enrichir le vocabulaire. "Le vocabulaire de la langue anglaise, naguère limité à quelques centaines de mots seulement, s'est étendu à plus d'un million de termes lorsque les livres ont proliféré", écrit-il, s'appuyant sur Walter J. Ong. Pourquoi, dès lors, la situation serait-elle différente de "l'hypermédia" ?
Les passages cités par Business Insider ne permettent pas d'en savoir davantage sur les travaux de Marco Catani. Tout juste sait-on que le nombre moyen de mots maîtrisés par les nouvelles générations devrait être, du fait de la progression de l'apprentissage visuel des mots plutôt que sonore, un peu plus faible que la moyenne des générations précédentes.
Lexique des uns, lexique des autres
La manière d'apprendre des nouveaux mots n'est sans doute pas le seul paramètre à prendre en compte. La nature des conversations et des lectures de l'individu entre nécessairement en ligne de compte dans la richesse du lexique possédé par chaque individu (3 à 5000 pour une personne peu instruite, 30 à 50 000 pour un lettré) au-delà de savoir si les mots sont mieux retenus en les lisant ou en les entendant.
C'est ce que relève Bernard Bouillon, en publiant quelques statistiques d'ouvrages sur son site personnel. "Un livre de littérature populaire peut compter un demi-millier de mots (Sans Famille, d'Hector Malot, 439) ; un livre mieux écrit, 3 fois plus. La Bible, en anglais (c'est équivalent sans doute en français), 6000 mots ; mais une traduction " basique " la réduit à 850. Shakespeare ' monte ' à 24 000 mots".
Un constat similaire ne peut-il être établi du côté des nouvelles technologies, dans la mesure où les publications en ligne peuvent elles aussi compter de quelques centaines de mots à plusieurs dizaines de milliers de termes différents ? Sans doute. Il est clair que la variété du lexique peut changer entre un article de fond ou un court billet.
Mais Nicholas Carr considère que la nature de l'hypermédia (comprendre : disposant de l'hypertexte) "gêne la compréhension de la lecture et l'apprentissage, [éparpillant] la concentration et [nuisant] à la mémorisation". Dès lors, l'effet positif de la lecture via les livres en papier (cf l'observation de Ong) sur la richesse du vocabulaire ne pourrait se reproduire lors de la lecture sur écran.
( photo : CC BY-SA Bundesarchiv, Bild )
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