Souvent épinglée par les organismes de défense des libertés individuelles, la Russie est considérée comme l'un des pays les plus liberticides vis-à-vis d'Internet. À de multiples reprises, Moscou a cherché à appliquer une politique durcie, en proposant un bien large et bien flou "code de bonne conduite" sur le net, en cherchant à étendre la censure par la voie législative ou en luttant plus fermement contre le piratage.
Dans ces conditions, il n'est pas surprenant que l'ONG Reporters Sans Frontières classe la Russie dans la catégorie des pays à surveiller, puisque les autorités russes "ont instrumentalisé la question sécuritaire pour accroître la censure et la surveillance", avec en ligne de mire les "contenus extrémistes", une catégorie très vague qui laisse toute latitude au pouvoir pour intervenir sans entrave.
Dernièrement, c'est le réseau anonyme décentralisé Tor qui s'est retrouvé dans la ligne de mire du pouvoir. Le site Russia Today indique que les services secrets russes, le FSB (ex-KGB), est favorable à l'interdiction de ce service, parce qu'il permet à l'internaute d'accéder à l'anonymat lors de la navigation sur la toile. Et si celui-ci est partiel, il demeure suffisant pour échapper à bien des regards indiscrets.
Les arguments avancés par le FSB pour justifier l'interdiction de Tor sont classiques : puisque le réseau est utilisé par des criminels, des contrefacteurs, des trafiquants d'armes, des dealers, des fraudeurs et des internautes engagés dans la distribution et la détention de contenus pédopornographiques, il faut donc que le législateur intervienne pour rendre illégale l'utilisation du réseau Tor sur le territoire russe.
Comme à chaque fois, l'approche des autorités est imparfaite sur un tel sujet. Ce n'est pas l'outil qui est en cause, mais son utilisation. Bien sûr qu'il faut combattre certains comportements hors-la-loi, mais l'outil lui-même est neutre. C'est exactement la même chose que le langage. Celui-ci peut à la fois être employé pour proclamer les plus belles idées et déverser les pires immondices intellectuelles. Or, il ne viendrait à l'idée de personne de bannir le langage.
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