L'automne dernier, la ville de Paris et les opérateurs de téléphonie mobile (Orange, Bouygues Télécom, SFR et Free Mobile) ont trouvé un terrain d'entente sur une nouvelle charte encadrant le fonctionnement des antennes-relais déployées dans la capitale. Deux nouveaux seuils d'exposition aux ondes électromagnétiques ont ainsi été définis : 5 volts par mètre (V/m) pour la 2G-3G et 7 V/m pour la 4G.
Principe de précaution et développement mobile
Aux yeux de la mairie, ces nouveaux plafonds constituent un compromis entre le principe de précaution visant à limiter l'exposition du public aux champs électromagnétiques et le développement de la téléphonie mobile, qui s'est traduit ces dernières années par l'arrivée de nouvelles normes (2G, 3G, 4G), l'érection de nombreuses antennes-relais et l'utilisation de nouvelles bandes de fréquence.
Surtout, la ville de Paris estime avoir évité de satisfaire certaines demandes des opérateurs, qui souhaitaient notamment un seuil rehaussé à 10 ou 15 V/m. À titre de comparaison, Paris avait demandé (.pdf) en 2002 aux opérateurs de contenir à 2 V/m le niveau moyen d'exposition effective sur 24 heures de la population parisienne dans les lieux de vie.
Sauver les acquis des autres chartes
Cette nouvelle charte n'a toutefois pas convaincu tout le monde. Ainsi, l'association Robin des Toits, qui milite en particulier pour un seuil d'exposition maximal de 0,6 V/m (pour la 2G) et un moratoire sur l'UMTS (3G), avait choisi d'attaquer en justice cette charte au motif qu'elle a été "négociée en catimini avec les seuls opérateurs par un adjoint au Maire". Mais mardi, l'association a finalement renoncé à son action.
La raison ? Robin des Toits craint que la procédure judiciaire n'aboutisse à une conclusion indésirable, où les tribunaux pourraient s'opposer au "principe même de ces chartes utilisées dans d'autres villes". Les efforts de l'association risqueraient alors d'être réduits à néant, alors même qu'elle a pu inciter des communes à mener des expérimentations à 0,6 V/m, à l'image de Tourcoing (.pdf) ou Montreuil (.pdf).
La nocivité des champs électromagnétiques pour l'homme est un sujet discuté depuis longtemps au sein de la communauté scientifique, mais aucune preuve formelle n'a jusqu'à présent été fournie. Le Centre international de recherche sur le cancer, dans des études sous l'égide de l'OMS, évoquait un risque potentiel de cancer en 2010 et 2011. Les études sont en tout cas prudentes sur le sujet et souvent contradictoires.
Plus d'antennes mais moins puissantes
Dès lors, comment concilier le principe de précaution avec le développement de la téléphonie mobile ? L'une des solutions suggérées est de multiplier les antennes-relais tout en diminuant leur puissance. C'est ce que réclame Robin des Toits et c'est cette piste qui est avancée dans un rapport d'un comité opérationnel, suggérant de multiplier le nombre d'antennes par trois.
Mais la proposition se heurte à deux obstacles. D'abord, les opérateurs : ces derniers préfèrent naturellement disposer de moins d'antennes mais plus puissantes plutôt qu'être à la tête d'un vaste parc d'installations émettant plus faiblement : l'installation d'une nouvelle base a en effet un coût. Or, les opérateurs mobilisent déjà d'importantes sommes ailleurs et le low cost limite les marges de manœuvre.
Le grand public, ensuite. En effet, multiplier le nombre d'antennes-relais au nom de la santé publique peut sembler contre-intuitif. Les réticences des riverains confrontés à de tels projets sont vives, en témoigne les pétitions contre Free Mobile ou les actions en justice qui ont débouché sur le démantèlement d'antennes-relais au nom du principe de précaution.
De son côté, le gouvernement écarte toute idée de révision à la baisse des seuils d'exposition imposés aux opérateurs sur leurs antennes relais. Sous la précédente majorité, le ministère de la santé avait organisé en un "Grenelle des ondes" qui avait laissé perplexe, puisqu'il était exclu de parler des antennes-relais, pour se concentrer exclusivement sur les mobiles. En toute logique, le Grenelle des ondes n'a débouché sur rien de concret.
Les seuils constatés
Reste que les seuils maximums fixés dans les chartes ne sont pas nécessairement ceux constatés sur le terrain. En début d'année, l'Agence nationale des fréquences (ANFR) "a mesuré un niveau d’exposition proche de la moyenne nationale qui s’établit à environ 0,9 V/m". L'ANFR a rappelé en outre qu'une carte du territoire regroupe les mesures effectuées par ses soins (2500 par an).
De son côté, le comité opérationnel a indiqué dans son rapport que "90 % des niveaux d'exposition modélisés sont inférieurs à 0,7 V/m, et 99 % à 2,7 V/m. Le niveau médian d'exposition est de 0,14 V/m, c'est-à-dire que 50 % des mesures montrent un niveau inférieur". Ces mesures ont été effectuées principalement par des simulations logicielles dans des zones spécifiques, en excluant la 4G et Free Mobile.
( photos : CC BY SA France64160 ; CC BY-SA Rosss )
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