Les autorités américaines sont-elles en train d'exagérer la menace terroriste et de survendre l'efficacité des programmes de surveillance pour justifier leur maintien ? C'est la question qu'il convient de poser, dans la mesure où l'écoute généralisée des communications n'a pas permis d'empêcher les attentats du marathon de Boston ou même de contrer les tueries qui frappent régulièrement les USA.
L'administration Obama affirme par exemple que les dispositifs de surveillance, renforcés depuis le 11 Septembre, ont permis de déjouer 54 projets terroristes. Cette déclaration n'avait pas convaincu Patrick Leahy, sénateur démocrate du Vermont et président de la commission judiciaire de la chambre haute du parlement américain, lors d'une audition organisée fin juillet.
À l'époque, Patrick Leahy expliquait que cette donnée mélange les résultats de deux programmes distincts, l'un ciblant les communications domestiques l'autre tourné vers les échanges électroniques à l'étranger. Dès lors, comment évaluer vraiment la pertinence et l'efficacité d'une surveillance interne ? "Si ce programme n'est pas efficace, il doit cesser. Jusqu'à présent, je ne suis pas convaincu par ce que j'ai vu", déclarait-il alors.
Trois mois plus tard, Patrick Leahy continue de mettre en doute l'intérêt de certains programmes, notamment celui consistant à capter les métadonnées des appels téléphoniques aux États-Unis. Et le sénateur démocrate a poussé le général Keith Alexander, directeur de la NSA, à admettre que les autorités exagèrent le péril terroriste pour accentuer le soutien de la population à l'égard de la surveillance de masse.
L'échange entre Patrick Leahy et Keith Alexander a été retranscrit par Salon. "Il n'existe aucune preuve que la captation massive des données téléphoniques a permis de déjouer des dizaines de complots terroristes", a d'abord déclaré le président de la commission judiciaire. Selon lui, sur les 54 cas avancés par Washington, seuls 13 auraient effectivement été contrés via la surveillance de masse.
"Tous [ces cas] n'étaient pas des complots et tous n'ont pas été neutralisés", a lancé Patrick Leahy à l'attention de Keith Alexander. "Êtes-vous d'accord avec ça, oui ou non ?" lui a-t-il demandé. "– Oui", a répondu le général. Cela, en supposant que les 13 cas restants n'ont pas impliqué d'autres sources de renseignement (renseignement humain, analyse, etc).
Le criminologue Alain Bauer expliquait justement ce paradoxe. Une écoute généralisée et permanente sur tout ce qui pourrait, éventuellement, intéresser les services de renseignement offre un intérêt très limité. Capter des milliards et des milliards de données, sans recul, sans but et sans analyse, ne permet pas de savoir quoi en faire. À tout surveiller, on ne surveille plus rien.
( photo : NSA )
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