Une firme française avait élaboré une technologie très novatrice, qui aurait pu contrarier les plans de la NSA. Il s’agissait de faire appel à la recherche quantique pour détecter toute tentative d’espionnage sur une fibre optique, comme celles qui traversent les océans d’un continent à l’autre. Mais l’aventure de l’entreprise s’est arrêtée soudainement, à cause d’un industriel français de la défense, selon une enquête du Point.

Afin d’accomplir sa mission de renseignement d’origine électromagnétique (SIGINT), la NSA s’appuie sur des moyens financiers absolument colossaux. L’organisme fédéral obtiendrait ainsi chaque année une enveloppe d’environ 10 milliards de dollars pour espionner à l’extérieur des frontières américaines mais aussi, de façon indirecte grâce aux liens tissés avec des agences étrangères, à l’intérieur.

Cette enveloppe (qui ne prend pas en compte l’argent consacré au déchiffrement des communications et les crédits accordés aux seize autres organisations, dont la CIA, le tout constituant le « budget noir« ) est ainsi utilisée pour la mise en place d’une galaxie de programmes et d’outils pour absorber, trier et analyser la masse incalculable de données récupérées au fil de l’eau.

Parmi eux, quelques projets ont été spécifiquement élaborés pour écouter les câbles sous-marins reliant les continents entre eux. C’est le cas de BLARNEY (programme en coopération avec AT&T concernant les écoutes de fibres optiques clés sur les points d’arrivée aux USA), EVILOLIVE (des sondes seraient placées sur les fibres optiques (sous-marin ou non)), FAIRVIEW, STORMBREW ou encore UPSTREAM.

Sous-marin espion

Et dans cette tâche, la NSA a le soutien du Pentagone et de la Maison Blanche. Preuve en est, les autorités américaines ont validé en 1999 les nouveaux plans de construction du sous-marin nucléaire d’attaque USS Jimmy Carter afin qu’il soit capable de se brancher sur les câbles sous-marins et effectuer des écoutes clandestines. Coût de l’opération ? 887 millions de dollars.

Ce sous-marin pourrait d’ailleurs être à l’origine des câbles endommagés au Moyen-Orient en 2008, dans la mesure où le nombre d’incidents survenus à l’époque dans un laps de temps aussi court (quelques semaines) peut difficilement relever de la coïncidence, mais plutôt de l’acte de sabotage. Au regard des documents publiés cet été par la presse grâce à Edward Snowden, cette piste n’est en tout cas pas à négliger.

Devant l’étendue de la surveillance américaine, le nombre de programmes mis en œuvre par la NSA et ses multiples stratégies pour contrecarrer le chiffrement des communications, une parade est-elle envisageable ? À en croire une enquête du Point, la France disposait d’un atout pour contrer – ou plus exactement détecter – l’espionnage survenant sur une fibre optique. Mais celui-ci a été gâché par un industriel français.

Cryptographie quantique

La société française SmartQuantum proposait en effet une technologie de cryptographie quantique capable de détecter l’espionnage et la surveillance sur les fibres optiques. Cette maîtrise, peu l’avait. « Nous n’étions que trois dans le monde à maîtriser cette technologie de manière industrielle, et nous étions en avance sur les Américains et les Suisses« , selon son ancien PDG.

L’idée de SmartQuantum était de se placer à l’entrée et à la sortie de la fibre optique pour analyser les photons y circulant. En cas de variation, il était possible de supposer l’espionnage de la ligne, car « lorsqu’un mouchard prélève un photon pour le lire, il le détruit« , a expliqué au Point l’un des ingénieurs de SmartQuantum.

Certes, SmartQuantum rencontrait des difficultés techniques. Il lui fallait trouver une solution pour allonger la distance sur laquelle il est possible de surveiller l’état des photons afin de rendre son projet intéressant pour les communications entre continents. Il était notamment question d’un projet de répéteur quantique, pour amplifier la communication et la porter beaucoup plus loin.

Gâchis d’une réponse imparfaite

Cependant, comme le relève Le Point, les projets de l’entreprise ont cessé. La cause ? Un industriel français travaillant dans le secteur de la défense aurait organisé la faillite de SmartQuantum faute d’avoir pu mettre la main sur sa technologie. La firme, identifiée par l’hebdomadaire mais non nommée, dément cependant la thèse du PDG de SmartQuantum.

Cela étant, le projet de cryptographie quantique aurait constitué une parade limitée. La NSA dispose d’autres cartes dans son jeu, tout comme les agences de renseignement étrangères. Si l’écoute des câbles sous-marins devenait moins attractive, il suffirait de se rabattre sur l’accès direct aux données des géants du net ou des opérateurs (PRISM, MAINWAY, MARINA…), qui lui est indécelable.

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