Jamais trop tard pour réagir ? Après la CNIL, qui a attendu la promulgation de la loi de programmation militaire pour dire tout le mal qu'elle pensait de la collecte de données en temps réel chez les FAI, alors qu'elle n'a pas pipé mot pendant tous les débats parlementaires, c'est une voix influente de la politique française qui se fait entendre après la bataille.
Dans une tribune publiée par Le Journal du Dimanche, qui aurait gagné à être publiée une semaine plus tôt, l'économiste, essayiste, romancier, biographe, patron de PlaNet Finance, Jacques Attali, s'énerve enfin contre l'article 20 (anciennement article 13) de la loi de programmation militaire. Celui-ci autorise des agents de l'Etat à procéder à un "recueil d'informations", "en temps réel", "sur sollicitation du réseau", le tout n'étant contrôlé qu'a posteriori, potentiellement au bout de 9 jours seulement, par la seule Commission Nationale de Contrôle des Interceptions de Sécurité (CNCIS), composée de trois membres seulement, dont au moins un des trois juge utile de le cacher… et de mentir sur le contenu de la loi dont il est censé contrôler l'application. Tout comme le ministre de l'intérieur Manuel Valls qui a lui aussi menti.
"Sans vouloir mettre en doute l’intégrité de ceux qui auront cette charge, la nature humaine est ainsi faite que tout homme utilise jusqu’au bout le pouvoir dont il dispose. Nous sommes déjà suivis, surveillés, et nous le serons de plus en plus, en raison de l’Internet des objets, du cloud computing et autres technologies à venir. La tyrannie de la transparence, dont j’annonce le danger depuis longtemps, vient, pour la première fois, de trouver sa traduction dans une loi. Une loi française", s'insurge Jacques Attali.
"Il est ahurissant qu’un tel texte ait pu être voté sans que nulle voix au Parlement ou dans les grands médias ne s’élève, malgré l’indignation des associations de droits de l’homme. Comme si chacun considérait déjà qu’il était l’ennemi de tous les autres. Et qu’il devait s’en garder par tous les moyens. Ainsi meurent les démocraties".
Mais le plus ahurissant selon nous est le fait que PS et UMP se sont mis d'accord pour ne pas déférer la loi devant le Conseil constitutionnel. Tous les observateurs savent cette loi inconstitutionnelle, notamment au regard des limites imposées par les sages à l'occasion du contrôle d'une loi anti-terroriste de 2006, mais le Conseil Constitutionnel n'a pas eu son mot à dire. La Constitution étant le socle de la République, c'est une conduite très anti-républicaine que de s'assurer que l'inconstitutionnalité d'une loi ne soit pas sanctionnée. Cela mériterait bien plus qu'une tribune dans Le Journal Du Dimanche, mais ça n'est visiblement pas un sujet de préoccupation majeur.
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