La décision a de quoi surprendre. En Allemagne, la GEMA, qui est l'homologue de la Sacem outre-Rhin, a obtenu une décision judiciaire qui interdit à Google de dire aux internautes que de nombreuses vidéos qu'ils souhaitent regarder ne peuvent leur être montrées faute d'accord de la GEMA, qui détient les droits sur les musiques utilisées.
En 2012, YouTube avait été condamné par la Haute Cour Régionale de Hambourg à bloquer en Allemagne les vidéos envoyées par les internautes, sur lesquelles étaient exploitées des musiques dont la GEMA détient les droits de gestion exclusifs sur le territoire allemand. La justice avait refusé au site de vidéos en ligne le bénéfice du statut de simple hébergeur des vidéos en cause, qui lui aurait permis de ne bloquer que les vidéos qui lui étaient étaient notifiées après leur mise en ligne. Allant contre la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union Européene, les magistrats allemands avaient obligé YouTube à filtrer préventivement toutes les vidéos proposées en Allemagne, pour bloquer d'office celles qui exploitaient le catalogue musical de la GEMA.
C'est ainsi que par exemple, l'an dernier, les Allemands n'avaient pas vu voir la vidéo d'un météore dans le ciel russe, parce que l'auteur de la vidéo était dans une voiture où l'autoradio était allumé, et diffusait une chanson transmise à la radio.
Incapable de se mettre d'accord sur un revenu minimum pour l'exploitation des chansons dans les vidéos (contrairement à la Sacem qui a signé mais à qui l'accord ne rapporte pas grand chose), YouTube avait donc suivi l'ordre judiciaire et expliquait à chaque fois aux internautes allemands que "malheureusement, cette vidéo n'est pas disponible en Allemagne parce qu'elle pourrait contenir de la musique pour laquelle la GEMA n'a pas accordé les droits musicaux respectifs". Ce qui est factuellement exact :
Effet recherché ou non, la rage des internautes allemands s'est donc tournée vers la GEMA, accusée d'empêcher le public d'accéder librement aux vidéos que le monde entier peut regarder. Elle est ainsi devenue plus impopulaire que jamais.
La Sacem allemande s'est alors tournée vers la justice pour demander que le message soit jugé comme une pratique de "dénigrement" de l'image de la société de gestion collective, et la cour de Munich lui a donné raison. Elle estime qu'il faudrait que le message explique que la vidéo n'est pas disponible faute d'accord entre YouTube et la GEMA, et pas simplement faute d'accord de la GEMA. Il faut être explicite et pas implicite.
"Depuis près de trois ans, YouTube a induit le public en erreur avec ces messages de blocage, et a illégalement influencé l'opinion publique au détriment de la GEMA", a expliqué le président de la société, Harald Heker, dans un communiqué. "La décision envoie un message important et positif : ce n'est pas la GEMA qui empêche de profiter librement de la musique sur Internet. Elle cherche réellement à signer un accord de licence avec YouTube, comme avec tous les autres portails de musique. Notre inquiétude est que les artistes participent à l'exploitation économique de leurs oeuvres et puissent en vivre à l'avenir".
La décision est cependant susceptible d'appel.
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