Ce n’est encore qu’un projet, mais il est pris suffisamment au sérieux pour qu’une agence gouvernementale suédoise ait décidé d’octroyer une dotation de près de 30 000 euros à l’association professionnelle Dataspelsbranchen, chargée de le mettre en place.
Selon le journal The Local, l’industrie suédoise du jeu vidéo songerait à enrichir les labels de signalement de contenus traditionnellement affichés sur les boîtes et présentations officielles de jeux, pour y ajouter un signalement relatif au respect ou nom d’un certain principe d’égalité entre les sexes. Pour attribuer un label (« contient de la diversité »), les professionnels se baseraient sur des critères tels que ceux établis par le test de Bechdel, conçu dans les années 1980 par l’auteure de BD Alison Bechdel.
Pris a contrario, le test veut qu’une oeuvre impliquant différents personnages est réputée sexiste dès lors qu’au moins un de ces trois critères n’est pas rempli :
- l’œuvre a deux femmes identifiables (elles portent un nom) ;
- elles parlent ensemble ;
- elles parlent d’autre chose que d’un homme.
Pour une illustration amusante mais très révélatrice de la pertinence du test de Bechdel, nous ne saurions trop conseiller de regarder cette présentation faite pour TED par Colin Stokes. Il démontre la piètre image de la femme véhiculée par les films hollywoodiens (jusqu’à une période récente impulsée notamment par Disney), y compris dans Star Wars où ceux qui ne sont pas des fans absolus auraient bien du mal à nommer une autre femme que la princesse Leia dans la trilogie d’origine, ou Amidala dans la prélogie (chose qui devrait changer avec l’Episode 7 qui pourrait même avoir une femme en héroïne principale) :
https://youtube.com/watch?v=ueOqYebVhtc%3Frel%3D0
Plus que la seule discrimination à l’égard des femmes, c’est l’ensemble des problématiques de discrimination à l’égard des sexes et des orientations sexuelles qui seraient combattues par le label suédois. Pour le moment, l’association Dataspelsbranchen n’a pas encore fixé les éventuelles modalités pratiques. Un point crucial sera de savoir s’il s’imposera à tous les éditeurs de jeux vidéo, à l’instar des labels PEGI que l’industrie a choisi de s’imposer à elle même en Europe, ou s’il sera uniquement délivré aux bons élèves. Plutôt qu’un label négatif « jeu sexiste » ou « jeu homophobe », le compromis le plus acceptable à court terme serait de délivrer un label tel que « jeu promouvant l’égalité entre les sexes » ou « jeu respectant la liberté sexuelle », que les éditeurs désireux de le faire pourraient mettre en avant.
Actuellement, le système PEGI prévoit déjà un label, exclusivement négatif, pour les jeux qui « montrent ou pourraient encourager la discrimination », qu’elle soit de nature raciale, xénophobe, religieuse ou encore sexuelle :
Il n’existe pas cependant de label positif pour encourager les bonnes pratiques de traitement égalitaire entre les sexes ou les orientations sexuelles. Il s’agirait d’une première mondiale qui pourrait être perçue comme un opposé de ce qui se pratique en Russie, où Les Sims 4 ont été interdits pour les relations homosexuelles qu’il permet entre Sims. De même en Inde, EA a choisi de ne pas sortir son dernier Dragon Age, en raison de la législation sur les « contenus obscènes », qui englobe le fait de montrer des personnages homosexuels.
L’objectif de non discrimination doit-il pour autant conduire à ce que tous les studios suivent l’exemple d’un éditeur comme Square Enix, qui fait systématiquement figurer des héros LBGT dans ses jeux vidéo, au risque de forcer la main des scénaristes, au détriment de leur propre liberté de création ? La question reste ouverte.
https://youtube.com/watch?v=X6p5AZp7r_Q%3Frel%3D0
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