Directement issue du rapport du député Thomas Thévenoud, qui fut par la suite un très éphémère ministre, la loi du 1er octobre 2014 met partiellement en oeuvre l'idée de favoriser les taxis en leur accordant un certain degré d'exclusivité de la géolocalisation en temps réel, qui est une fonctionnalité très importante des services de véhicules avec chauffeur (VTC).
L'article L3120-2.-III 1° du code des transports fait désormais interdiction aux VTC "d'informer un client, avant la réservation (…), quel que soit le moyen utilisé, à la fois de la localisation et de la disponibilité d'un véhicule (…) quand il est situé sur la voie ouverte à la circulation publique sans que son propriétaire ou son exploitant soit titulaire d'une autorisation de stationnement".
Cette disposition est écrite de façon suffisamment floue pour permettre une application tolérante. Par exemple, rien ne semble interdire de signaler qu'un véhicule est disponible à une certaine distance du client, sans préciser où il se situe exactement. Mais le géant Uber a tout de même décidé d'en contester l'application.
Selon Les Echos, Uber reproche au gouvernement français de n'avoir pas suivi la procédure d'information prévue par la directive 98/34/CE pour tout ce qui touche aux règles relatives aux services de la société de l'information. Elle impose aux états membres de notifier à l'avance à Bruxelles tout projet de règle qui "au regard de sa motivation et du texte de son dispositif, a pour finalité et pour objet spécifiques, dans sa totalité ou dans certaines dispositions ponctuelles, de réglementer de manière explicite et ciblée ces services (de la société de l'information)". Après la notification, les états ont l'obligation d'attendre au minimum trois mois avant d'adopter la règle souhaitée, le temps de permettre à la Commission de faire connaître, par exemple, son propre projet de réglementation, qui doit geler l'initiative nationale.
Or le Gouvernement n'a pas transmis la loi sur les VTC à la Commission. Toute la question est donc de savoir s'il devait le faire. La directive dispose qu' "une règle n'est pas considérée comme visant spécifiquement les services de la société de l'information si elle ne concerne ces services que d'une manière implicite ou incidente". C'est sur ce dernier mot que tout devrait se jouer.
Si jamais Bruxelles donne raison à Uber, la loi Thévenoud deviendra inopposable en justice concernant ses aspects qui auraient dû être notifiés. Selon Les Echos, la stratégie est aussi dilatoire. "Uber compte bien profiter de cette plainte dans son combat judiciaire contre certains de ses concurrents. Ces derniers l’ont assigné vendredi devant le Tribunal de Commerce de Paris pour dénoncer certaines de ses pratiques. La start-up américaine pourrait demander aux juges de surseoir à toute décision, et de vérifier auprès de la Cour de Justice de l’Union européenne que la loi « taxis-VTC » est bien inapplicable", explique le quotidien économique. "Cela lui laisserait donc encore de longs mois de tranquilité juridique pour consolider ses positions sur le marché français."
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