Lors d'une intervention au séminaire du CSA sur les enjeux économiques de l'audiovisuel en octobre dernier, le président de la République François Hollande avait annoncé que la procédure d'attribution de la bande des 700 Mhz vers les télécoms serait lancée en 2015. "Le calendrier est maintenant fixé, puisque l'Arcep lancera la procédure pour l'attribution des fréquences dès l'année prochaine. Et ce délai est, pour ce qui me concerne, impératif", avait même lâché le chef de l'Etat.
Mais l'autorité présidentielle n'étant pas le trait qui caractérise le mieux François Hollande, il se pourrait bien que ce délai impératif soit finalement écarté.
Dans le Canard Enchaîné de mercredi cité par Univers Freebox, un opérateur télécom affirme en effet que "Bercy annoncera qu'à la suite de retards, l'opération est reportée, au mieux en 2016". Au mieux, c'est-à-dire qu'elle pourrait même ne pas avoir lieu d'ici la fin du quinquennat, ce qui n'arrangera pas le redressement des finances publiques. Dans le projet de loi de finances 2015, le ministère des finances a en effet inscrit 2,04 milliards d'euros au "produit des redevances acquittées par les opérateurs privés pour l’utilisation des bandes de fréquences comprises entre 694 MHz et 790 MHz".
L'attribution des fréquences de la bande des 700 Mhz avait été identifiée comme un "enjeu majeur" pour l'Arcep dès 2013, l'autorité souhaitant aller au plus vite dans le processus, pour faciliter l'accès au très haut débit mobile en France. Actuellement affectées exclusivement à la télévision TNT, les fréquences doivent être réaffectées aux opérateurs télécoms pour leur permettre notamment d'étendre leurs services 4G.
Free pressé, Orange beaucoup moins
Si le processus est retardé, ce serait une mauvaise nouvelle pour Free qui s'était préservé sur les précédentes enchères sur la bande des 800 Mhz, en prévision des nouvelles retombées du dividende numérique. L'opérateur a en effet laissé ses concurrents s'affronter sur le 800 Mhz, puis a cassé les prix du marché mobile pour prendre des parts de marché et s'assurer qu'ils n'aient plus la capacité de surenchérir au moment de l'attribution des licences 700 Mhz.
Celles-ci ont plusieurs avantages technologiques très importants, en particulier une meilleure pénétration dans les immeubles, et une couverture plus large à puissance équivalente.
"Il va falloir mettre de l'argent pour avoir du spectre, et on va voir qui est là pour investir dans les télécoms, qui est là pour longtemps", avait prévenu Xavier Niel le mois dernier. "On espère que l'appel d’offres va être lancé bientôt et on veut encore plus de spectre pour fournir plus de débit". L'obtention de fréquences sur la bande 700 Mhz fait partie des priorités affichées aux actionnaires, et permettra à Free de remplir plus facilement ses objectifs, voire ses obligations légales, en terme de couverture de la population par son propre réseau.
Free est donc pressé de pouvoir obtenir ces fréquences, contrairement à ses concurrents qui freinent la procédure. En octobre, Orange avait expliqué qu'il participerait aux enchères, mais qu'il n'était pas du tout pressé. Les fréquences actuellement exploitées "sont largement suffisantes pour les dix prochaines années", avait affirmé la directrice générale d'Orange, Delphine Ernotte-Cunci, dans une interview aux Echos.
L'enjeu pour l'Etat est aussi d'arbitrer entre la rentrée d'argent que permettrait une mise aux enchères immédiate, et d'autres intérêts comme l'investissement des opérateurs privés en fibre optique dans le cadre du plan France THD, qui a lui aussi pris du retard. Tout ce qui est investi aujourd'hui dans les ondes mobiles ne le sera pas dans le très haut débit fixe. Or s'il n'y a d'urgence aux 700 Mhz que pour Free, l'intérêt général pourrait être d'attendre, non seulement pour favoriser le développement du haut débit fixe sur tout le territoire, mais aussi pour attendre d'éventuels jours meilleurs, où la situation financière des opérateurs permettra à nouveau de faire monter les enchères. Sans oublier qu'au final, ce sont toujours les consommateurs qui payent la facture des ondes mises en vente, et qu'il s'agit donc d'une forme d'impôt indirect.
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