La Russie veut obliger les grands réseaux sociaux à censurer davantage leurs utilisateurs, s'ils ne veulent pas prendre le risque d'être bloqués dans un marché de plus de 80 millions d'internautes. Le quotidien Izvestia rapporte en effet qu'Alexander Zharov, le directeur du Roskomnadzor qui régule les télécommunications en Russie, a écrit le 18 mai 2015 à Facebook Microsoft et Twitter pour exiger qu'ils respectent au plus vite la "loi sur les blogueurs" de 2014. S'ils refusent, leurs services seront bloqués comme l'avait été Github qui a dû plier.
"Ces lettres sont devenues une pratique courante dans nos relations avec les sociétés internet étrangères", explique un porte-parole du Roskomnadzor. "Habituellement, quelques progrès se produisent après l'envoi de ces lettres. Nous espérons que ça sera le cas".
Très contestée parce qu'elle vise à verrouiller et contrôler l'information, la loi sur les blogueurs interdit l'anonymat aux internautes qui ont une certaine influence par leurs écrits. En conséquence, Google, Twitter, Facebook et tous les autres hébergeurs de pages web et autres comptes de réseaux sociaux ont l'obligation de fournir aux autorités les identités des auteurs de pages russes générant plus de 3 000 lectures par jour. Toute omission peut valoir une amende d'un montant très symbolique (jusqu'à 500 000 roubles, soit environ 9 000 euros), mais surtout 30 jours de suspension de l'accès aux services.
POUSSÉS A L'AUTO-CENSURE
En outre, le Roskomnadzor rappelle que la loi russe oblige les entreprises à censurer d'office les "contenus extrémistes", tels que des appels à des émeutes ou à des manifestations non autorisées (ce qui, pour mémoire, est aussi le cas en France et aux USA). En théorie, le régulateur ne demande le blocage que des contenus en cause, et ordonne aux FAI de les bloquer si les hébergeurs ne le font pas. Mais le protocole HTTPS rendant théoriquement impossible le blocage d'une URL précise — sauf à recourir au DPI, c'est l'ensemble des domaines Facebook.com, Twitter.com ou Google.com (et YouTube.com, etc.) qui seraient bloqués si les services en ligne ne faisaient pas régner l'ordre chez eux.
L'an dernier, la crainte d'un blocage avait déjà incité Facebook à censurer une page de soutien à un opposant politique, sans coups férir.
La Russie étant membre du Conseil de l'Europe, la Cour européenne des droits de l'homme pourrait devoir un jour se pencher sur la légalité de la loi russe, et sanctionner le pays de Vladimir Poutine. Mais en attendant, le régime entend bien appliquer la plus grande fermeté pour contrôler ce qui se dit sur Internet.
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