A l'occasion de la restructuration de Google qui devient une filiale du groupe "Alphabet", Larry Page a annoncé lundi qu'il laissait la place de directeur de Google à Sundar Pichai, un homme de 43 ans aussi discret qu'influent dans le succès de l'entreprise qu'il a intégré en 2004 pour l'aider à développer ses activités au delà du moteur de recherche initial, pour devenir un concurrent frontal de Microsoft ou Apple.
Lors de son arrivée il y a une dizaine d'années, Sundar Pichai avait ainsi pris en charge la production de logiciels et applications conçus par Google, comme le navigateur Chrome, l'environnement Chrome OS, Google Drive, Gmail, ou Google Maps. Il était depuis 2014 également à la tête du très stratégique système d'exploitation Android, autrefois géré par Andy Rubin. Larry Page avait nommé Pichai directeur des produits Google en octobre 2014, préparant son arrivée au poste de directeur général (CEO) de Google.
Pichai bénéficie ainsi de toute la confiance des co-fondateurs du groupe, Larry Page ayant réservé à son sujet ses mots les plus bienveillants, dans sa lettre ouverte d'explication de la restructuration. "Sundar a dit les choses que j'aurais dites (et parfois mieux !) depuis quelques temps maintenant, et j'ai adoré notre travail ensemble", raconte-t-il. "Sergey et moi avons été très exaltés par ses progrès et son dévouement à l'entreprise. Et il est clair pour nous et notre conseil d'administration qu'il est temps qu'il soit PDG de Google. Je me sens chanceux d'avoir quelqu'un d'aussi talentueux que lui pour diriger [Google], et ça me libère du temps pour continuer à développer nos aspirations".
"Ca va être un super CEO", s'est pour sa part réjoui Eric Schmidt, l'actuel président de Google, dont le rôle dans le groupe Alphabet n'a pas encore été éclairci :
Really excited about the vision and brilliance of Sundar.. he's going to be a great CEO! http://t.co/2bqtPEjoQH
— Eric Schmidt (@ericschmidt) 10 Août 2015
Mais Sundar Pichai a aussi une qualité qui, aussi étrange que ça puisse paraître, rassure les investisseurs : il est Indien. Né à Tamil Nadu, il partage notamment avec le patron de Microsoft Satya Nadella ce trait commun désormais très recherché par les grandes entreprises américaines. Les Indiens ont en effet gagné la réputation d'avoir, par leur culture, les qualités requises pour gérer une entreprise au management moderne, plus participatif et moins autoritaire, avec la capacité d'entraîner tous les cadres dans une même direction, par consensus. Adobe, Pepsi, Deutsche Bank, MasterCard, font partie des entreprises désormais gérées par un Indien.
"Il n'y a rien de spécifiquement indien à propos de l'empathie, de l'humilité, de la patience et de la capacité à rêver. Ce sont pourtant ces qualités qui ont semblé créer le "club indien" des perfectionnistes dans les entreprises mondiales", concluait à ce sujet Bloomberg lors de la nomination de Satya Nadella l'an dernier (alors qu'une rumeur avait circulé concernant la nomination de… Sundar Pichai). Déjà en 2007, CBS prévenait que les dirigeants indiens seraient de plus en plus nombreux aux Etats-Unis, de part leur faculté à comprendre les marchés émergents des BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine), à s'adapter à leur culture, et au fait que l'anglais est leur langue maternelle.
Le fait d'être Indien n'est toutefois pas ce qui explique l'ascension fulgurante de Pichai, qui la doit d'abord à son talent et à sa capacité à comprendre les attentes du public et à motiver ses équipes, dans la bonne humeur. Comme le note le New York Times, Sundar Pichai mettra les utilisateurs au centre de sa réflexion, pour proposer des produits à la fois innovants et simples à utiliser, dans une philosophie qui n'est pas sans rappeler celle d'Apple.
Pichai avait obtenu un diplôme d'ingénierie en métallurgie à l'Indian Institute of Technology, avant d'aller étudier à Stanford et d'obtenir un diplôme en sciences et ingénierie des matériaux, et d'obtenir un MBA à l'Université de Pennsylvanie. Ce n'est donc pas un spécialiste des télécoms et pour l'anecdote, Business Week raconte qu'il n'avait pas le téléphone chez lui avant l'âge de 12 ans, ni la télévision ou même une voiture. Il aurait rejoint Google après avoir tenté de dissuader un collègue d'y accepter un poste, et de réaliser finalement face aux contre-arguments que Google était l'entreprise qu'il voulait lui-même rejoindre.
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