Le robot Pepper est un hit au Japon. Conçu par Aldebaran Robotics, entreprise française acquise presque entièrement par le géant japonais Softbank, l'androïde s'arrache en quelques minutes à chaque fois que les usines de production sortent assez de modèle de leurs tuyaux pour proposer une mise en vente. Et comme Pepper est un compagnon du quotidien, Softbank a pensé à ajouter à son manuel des instructions qui relèvent plus de l'éthique que de l'utilisation pure.
Interdiction
Depuis quelques jours, l'une d'entre elles passionne la presse japonaise : il est stipulé dans le manuel qu'il est interdit d'utiliser le robot pour une relation sexuelle. Ou plus exactement, qu'il est interdit d'avoir des comportements "sexuels ou indécents" avec le robot. La punition dans le cas où un heureux possesseur de Pepper irait satisfaire ses pulsions sur le pauvre robot ? Une rupture du contrat d'utilisation en bonne et due forme, ce qui prive notamment de garantie.
Mais Softbank est allé plus loin et interdit également aux utilisateurs de Pepper d'utiliser le robot pour "associer des personnes de sexe opposé qui ne se connaissent pas". La traduction de la formule est complexe, mais même les journaux japonais semblent se demander ce que les constructeurs ont voulu dire. Souhaitaient-ils interdire à Pepper de devenir un proxénète ou un organisateur de speed dating ? Ou alors interdit-on aux utilisateurs du robot d'en faire un prétexte pour aborder quelqu'un lors d'une soirée ? Pourquoi, dans ce cas, ne pas mentionner les relations homosexuelles ?
Difficile de répondre à ces questions tant la formule est évasive. En appliquant un principe de précaution, on pourrait résoudre le problème de manière simple : il ne faut pas impliquer un robot Pepper dans quoi que ce soit qui ait, de près ou de loin, un rapport avec une activité sexuelle.
Anthropologie du robot
Et ces réflexions autour du robot d'Aldebaran et du manuel d'utilisation proposé par Softbank interviennent à une époque où se posent, de plus en plus, les questions du sexe robotisé. Le docteur Richardson, anthropologue spécialisée dans les questions éthiques liées à la robotique, vient par exemple de lancer une campagne contre les robots destinés au plaisir sexuel.
Pour elle, il s'agit d'un prolongement de la prostitution qui est déjà un acte de transformation d'une personne en "objet sexuel". Elle ne s'en cache pas : son combat est plus pour l'abolition de toute forme de prostitution que spécifiquement contre les relations sexuelles avec des robots. Elles ne sont pour elle qu'un symptôme d'un problème bien plus vaste. Cependant la réduction des robots à des objets sexuels ne pourrait qu'encourager une pratique qui, depuis trop longtemps, "objectifie les femmes et les enfants", comme le dit le premier point du manifeste.
Un sujet qui n'a donc rien de léger et dont il est difficile de voir les conséquences aujourd'hui, dans la mesure où les robots sexuels n'en sont qu'à leurs balbutiements. Bien avisé, Softbank a donc préféré jouer la carte de la prudence pour son robot star.
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