C’est une chance pour les éditeurs de jeux-vidéo dans le drame qui s’est encore abattu récemment aux Etats-Unis. Cette fois-ci, il n’y avait aucun lien entre les jeux-vidéo et Sulejman Talovic, le forcené de 18 ans qui a tué six personnes et en a blessé plusieurs autres dans un centre commercial de Salt Lake City le 13 février dernier. Surtout depuis le massacre de Columbine, il est devenu un réflexe aux Etats-Unis d’accuser la violence des films et des jeux-vidéo pour expliquer les fusillades chroniques, plutôt que de pointer d’abord du doigt la libre circulation des armes…
Ces dernières années, les rapports se sont multipliés pour décrire l’existence d’un lien de causalité entre la violence montrée et virtuellement vécue dans les jeux-vidéo, et les comportements violents adoptés par des joueurs. Or selon un chercheur texan, les méthodes employées dans les études pour établir ce lien de cause à effet sont très contestables. Christopher Ferguson, chercheur de l’Université Internationale A&M du Texas, est attaché au département des sciences comportementales appliquées et de justice criminelle. Selon ses travaux, qui ont comparé et confronté 25 études sur les effets des jeux-vidéo violents, les résultats sont « contradictoires ». « Les résultats globaux de l’étude ont montré que bien que les jeux-vidéo violents semblent accroître les pensées aggressives des gens (ce qui ne saurait pas être une surprise que les gens pensent encore à ce qu’ils viennent de jouer), les jeux violents ne semblent pas accroître les comportements violents », note le Professeur Ferguson.
Chercheurs et médias : l’oeuf ou la poule ?
Le chercheur a détecté chez ses confrères une certaine tendance à partir de la conclusion souhaitée pour trouver ensuite les méthodes à utiliser. Or « les études qui emploient des mesures d’agression moins standardisées produisent des effets plus grands que les mesures d’agression mieux standardisées ». « En d’autres mots », continue-t-il, « des mesures d’agression meilleures sont associées à des effets plus faibles ». Dit encore autrement, lorsque les chercheurs utilisent des méthodes scientifiques éprouvées et non pas inventées pour l’occasion, les conclusions paraissent beaucoup moins… concluantes.
Ferguson accuse implicitement les chercheurs et les revues scientifiques d’avoir cédé à la pression médiatique. Les médias veulent à tout prix qu’existe un lien entre la violence dans les médias ou dans les jeux et les violences perpétrées par les jeunes. Les études qui voulaient prouver l’existence d’un tel lien ont été publiées et relayées plus facilement que les autres, dénonce en substance le professeur texan. Or « une lecture attentive de la littérature [scientifique] révèle que beaucoup d’études qui ont soutenu l’existence de ce lien offraient uniquement des preuves contestables ou inconsistentes », accuse-t-il.
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