C’est ce mercredi matin à 11H30 que les ministres Christine Lagarde et Christine Albanel ont présenté à la presse la mission du gouvernement sur la lutte contre le téléchargement illicite, dont les conclusions seront rendues en novembre. Que peut-on attendre de cette mission confiée au patron de la Fnac ?

La ministre de l’Economie, des Finances et de l’Emploi, Christine Lagarde et la ministre de la Culture et de la Communication Christine Albanel présentaient ce matin à la presse la mission du gouvernement sur la lutte contre le téléchargement illicite. Un aveu d’échec de la loi DADVSI, un an après sa promulgation, ou un simple élément de plus à ajouter à la longue liste de symptômes de la comitologie à la française ?

Si ce n’est à envoyer un signal de présence à l’industrie culturelle pour la rassurer sur le volontarisme affiché de Nicolas Sarkozy, on ne comprend en effet pas très bien à quoi la mission sur « la lutte contre le téléchargement illicite et pour le développement des offres légales d’œuvres musicales, audiovisuelles et cinématographiques » va bien pouvoir servir.

Sur la forme d’abord, il y a son chargé de mission, Denis Olivennes. Outre le conflit d’intérêt évident liée à la fonction professionnelle du président de la Fnac et ancien patron de Canal+ (groupe Vivendi), Olivennes est aussi l’auteur d’un pamphlet au nom évocateur : « La gratuité, c’est le vol : Quand le piratage tue la Culture« . Ca a au moins le mérite d’écarter tout soupçon sur la neutralité du rapport. C’est sûr, avec un tel chargé de mission, il n’y en aura aucune. Autant demander directement à Universal Music ou Virgin ce qu’ils veulent et en faire loi, et économiser au contribuable les frais et indemnités de M. Olivennes. Celui-ci, obsédé par l’idée que la gratuité culturelle est un mal, n’hésite d’ailleurs pas à parler de sa mission comme d’un « mini-Grenelle de la gratuité ».

Sur le fond ensuite, à quoi peut bien servir cette mission pour laquelle Denis Olivennes consultera les différents acteurs du marché jusqu’en octobre ? L’état de l’industrie culturelle dans son adaptation au numérique est désormais bien appréhendé aussi bien par les pouvoirs publics que par les acteurs industriels, et tous sont à peu près d’accord sur le diagnostic depuis les premiers travaux sur la loi DADVSI. S’il s’agit encore uniquement de se regarder dans les yeux pour se plaindre mutuellement, accuser les pirates en cherchant des modes de sanction et ne pas chercher de vrai remède de cheval, la mission tient davantage de la thérapie de groupe façon tête d’autruche que d’une réelle prise en charge globale de la mutation industrielle. Le piratage sur lequel cette énième mission va plancher n’est qu’un microphénomène dans les changements globaux qu’entraîne Internet dans la consommation des biens culturels. Cela se joue à l’échelle planétaire, pas entre les six murs de l’Hexagone. Pourtant Denis Olivennes compte bien présenter une « base solide » qui « ne devrait pas dépasser la taille d’une feuille A4 ».

D’après Clubic, « le gouvernement souhaite voir naître des offres légales plus diversifiées (avec des catalogues plus riches aussi bien pour la musique que pour le cinéma) et rappelle que  » le piratage ne doit pas être le seul moyen de trouver une œuvre, même rare « . Les prix doivent aussi évolués avec de nouveaux modèles économiques comme le financement par la publicité. Enfin, la clarté des informations sont elles aussi amenées à évoluer (possibilités offertes par les verrous numériques, compatibilités, achat définitif ou simple location…) avec en parallèle une interopérabilité accrue et étendue qui doit permettre l’écoute sur son ordinateur, sur son baladeur, dans sa voiture…« .

Quelle véritable nouveauté par rapport à la Charte signée par le gouvernement et les professionnels… il y a trois ans ?

La riposte graduée, qui devait faire son grand retour avec cette mission, est finalement déjà abandonnée (c’est un bon point, disons-le) par le gouvernement. Alors, au delà des mesurettes d’affichage et d’un nouvel accord interprofessionnel de façade, à quoi va-t-elle, cette mission ? Osons le dire : à rien.

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