Posez-vous la question quelques secondes. Qui entendez-vous le plus vous plaindre du piratage ? Sont-ce les artistes, ou plutôt les maisons de disques ? Si vous avez choisi la deuxième option, vous avez gagné. Car l’industrie musicale ne semble pas mise en danger par la liberté de copie et de diffusion que permet Internet. Seule l’industrie du disque, de la musique enregistrée, semble en pâtir. Après les chiffres de l’IFPI que nous avions révélé en exclusivité et qui marquaient nettement cette tendance, c’est cette fois la BMI, l’une des deux Sacem américaines (là-bas il n’y a pas de monopole), qui en apporte la preuve.
La société de gestion collective qui perçoit au nom des artistes et leur redistribue les sommes dues au titre des interprétations musicales, est tout sourire. Elle a perçu dans son exercice annuel achevé le 30 juin dernier 839 millions de dollars de droits, ce qui lui a permis de reverser aux auteurs et compositeurs de musique 732 millions de dollars une fois tous les frais déduits. Un record mondial historique. C’est 8 % de mieux que l’année précédente. En clair, les artistes ont touché cette année plus que l’année précédente, malgré un marché du disque toujours en baisse.
Car si comme dans le reste du monde les Américains achètent moins de disques, il n’y a en revanche jamais eu autant de consommation indirecte de musique. Elle est aujourd’hui omniprésente. Avec la déconcentration des médias permise par le numérique, le nombre de médias diffuseurs-payeurs explose également. La BMI a enregistré pas moins de 500 nouveaux clients dans les médias numériques pendant cette année, et compte 11 millions de dollars de plus grâce aux télévisions et radios par câble et satellite.
Si vous entendez en France la Sacem protester et crier avec les loups contre le piratage et le numérique, il ne faut pas chercher très loin pour en comprendre la véritable raison. Dans « SACEM », il y a « E » pour « Editeurs ». Et ceux-ci, qui sont en fait les maisons de disques, seules véritables perdantes du tournant industriel, n’hésitent pas à faire pression sur la société de gestion collective pour influer son lobbyisme. Voilà par exemple ce que répondait hier Pascal Nègre, PDG de Universal Music France, à nos confrères de PC Inpact. Ca se passe de commentaire :
« On est un des principaux clients de la SACEM. Nous, Universal, on doit faire l’un des plus gros chèques à la Société. Ensuite, on est le premier éditeur en France. Ça veut dire qu’on est un des principaux ayants droit de la Sacem. Faites-moi confiance, la SACEM, on la respecte. On est en train de négocier avec elle et on trouvera un accord comme on a toujours trouvé des accords avec elle. Il n’y a pas de problème là-dessus.«
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