Les millions d’artistes amateurs qui font le succès de MySpace pourraient être responsables de la fortune renouvelée des majors du disque. L’incontournable site communautaire de musique en ligne devrait bientôt être détenu pour partie par les majors de l’industrie du disque, d’une manière qui devrait étendre leur domination traditionnelle vers le marché des nouveaux médias. Sony BMG et Warner pourraient signer dès cette semaine leur acquisition de parts de MySpace.

MySpace ne créera pas une révolution dans le paysage de l’industrie musicale. C’est même le contraire qu’il s’apprête à faire. Alors que les majors possèdent collectivement les catalogues de quelques dizaines de milliers d’artistes au maximum, le club des quatre devrait bientôt posséder jusqu’à la moitié de parts de MySpace, dont la valeur a été créée par plus de 5 millions d’artistes indépendants à travers le monde. Les « petits artistes », qui voyaient en MySpace une voie de liberté et une manière de se passer des majors pour leur promotion, vont contribuer à l’enrichissement de ceux dont on prédisait déjà la mort.

Comme nous le rapportions en février dernier, la maison-mère de MySpace News Corp. veut lancer sur le site communautaire un service de consommation de musique illimitée, et est prête pour y parvenir à céder des parts de MySpace aux quatre majors de l’industrie, en échange du droit d’exploitation en ligne de leur catalogue. Selon le New York Post, Sony BMG et Warner Music Group seraient proches d’un accord définitif, qui pourrait intervenir dès cette semaine. « Tout le monde travaille avec un sens de l’urgence pour essayer de le conclure« , confie au journal une source interne proche des négociations. Universal et EMI devraient également signer, mais les discussions sont moins avancées.

L’accord permet aux majors signataires de posséder une part minoritaire de MySpace et de toucher une participation sur les revenus publicitaires générés par le site. En échange, elles accordent à MySpace le droit d’exploiter librement leur catalogue, audio et vidéo, y compris pour des formules de musique illimitée. Le service, qui devrait être lancé dans le courant de l’année 2008, devrait proposer un mélange entre le téléchargement payant à la carte et la musique gratuite financée par la publicité. D’autres « produits » comme des sonneries de portables devraient être proposés.

Ensemble, les majors du disque devraient détenir moins de 50 % des parts, ce qui permettra à News Corp. de garder le contrôle de l’entité. Mais les majors pourront exiger dans le cadre de l’accord une meilleure exposition de leur catalogue sur la plateforme, ce qui va contribuer à entretenir leur domination du marché musical. MySpace attire chaque mois plus de 15 millions de visiteurs, qui seront dirigés en priorité vers les catalogues d’Universal, Sony BMG, Warner et EMI.

Les parts des majors dans MySpace seront réparties entre les maisons de disques au prorata de leur part de marché actuelle, ce qui devrait là aussi contribuer à geler le rapport des forces sur le marché. Les gros resteront gros, et les petits n’auront rien.

MySpace n’est toutefois pas la destination unique des amateurs de musique, et montre même des signes de faiblesse. Le rapport des forces pourra toujours évoluer si les 5 millions d’artistes amateurs qui font la fortune de MySpace décident de faire leurs valises pour se rendre sur d’autres plateformes. L’enjeu, pour MySpace, est donc de réussir à exploiter les catalogues des géants de l’industrie sans faire fuire ce qui fait sa propre richesse.

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