Pas question de changer d’un iota la ligne directrice et de retirer le projet de riposte graduée des tuyaux législatifs. Même si la mesure phare, la suspension de l’abonnement à internet, a été jugée contraire aux droits fondamentaux et aux droits de l’Homme par le Parlement européen, le projet de loi relatif à la haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (loi Hadopi) reste une priorité pour le ministère de la Culture.
Contacté par Numerama, le cabinet du ministère de la Culture refuse de voir dans le vote européen une sanction anticipée du mécanisme de riposte graduée qui avait fait l’objet d’un accord entre les FAI, le gouvernement et les organisations culturelles. Le cabinet estime que le Parlement a adopté l’amendement au rapport Bono « sans être au courant du projet français« . Pourtant, la veille, le rapporteur Guy Bono avait fustigé « la position de certains États membres, dont les mesures répressives sont des mesures dictées par des industries [culturelles]« , et pointé du doigt « la coupure d’un accès internet [qui] est une mesure disproportionnée au regard des objectifs« . Même s’il n’a pas désigné nommément la France, ce qui ne se fait jamais par respect diplomatique, tous les regards étaient portés sur l’hexagone.
L’amendement au rapport Bono adopté jeudi invite les Etats-membres, dont la France, à « éviter de prendre des mesures qui entrent en contradiction avec les libertés civiques et les droits de l’homme et avec les principes de proportionnalité, d’efficacité et de dissuasion, telles que l’interruption de l’accès à l’Internet« . Mais le cabinet de Christine Albanel n’a « pas franchement le sentiment » que la suspension de l’accès à Internet après deux avertissements de nature préventive soit une violation des droits de l’homme. Il rappelle, en outre, qu’un rapport voté par le Parlement européen n’a aucune force contraignante sur le plan juridique.
Sur le plan politique, le gouvernement souhaite rester droit dans ses bottes et continue d’assurer que la riposte graduée est la seule alternative possible à la répression pénale qui prévaut actuellement en droit français. Le cabinet nous assure que le projet de loi reste intact et qu’il sera présenté en mai au Conseil des ministres, pour être débattu en juin ou juillet prochain au Parlement.
Sachant que la France assurera la Présidence du Conseil de l’Union européenne à partir du 1er juillet, il serait tout de même mal venu de voter un dispositif jugé contraire aux droits de l’Homme par le Parlement européen… Mais pour le moment, ça ne semble pas gêner le gouvernement et Christine Albanel.
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