Nous avions révélé il y a un an et demi qu’une société de gestion collective américaine, SoundExchange, n’arrivait pas à retrouver la trace de 52 artistes français de renom, ainsi privés de leur chèque de droits d’auteur. C’était, nous semblait-il, un travail beaucoup plus urgent et concret pour leurs maisons de disques et les sociétés d’artiste-interprètes en France que la lutte contre le piratage. Qu’on rassure leur famille, depuis notre article, SoundExchange a retrouvé la trace de 34 artistes français. Ouf.
Jean-Jacques Goldman, Bernard Lavilliers, Zazie, Michel Polnareff, Ophélie Winter, Alain Souchon, Julien Clerc ou encore Johnny Hallyday ont tous reçu leur chèque, ou devraient le recevoir rapidement.
Mais Patrick Bruel, Daniel Balavoine (qui, c’est vrai, n’attend plus tellement de chèque), Eddy Mitchell, Enrico Macias, Jean-Louis Aubert, Jean-Louis Murat, MC Solaar, William Sheller ou encore Richard Cocciante restent malheureusement introuvables. Depuis au moins 17 mois, c’est tout de même balo. Ils n’ont pas retrouvé non plus ni Nino Ferrer, mort à Montcuq en 1998, ni Charles Trenet, mort en 2001 à Créteil.
En tout, en septembre 2006, ce sont 8897 artistes que SoundExchange avait listés sur son site et qu’elle n’arrivait pas à retrouver. Aujourd’hui, la société de gestion liste 7872 noms. Ce qui fait 1025 artistes retrouvés en 17 mois, soit environ 60 par mois, ou 2 par jour en moyenne. A ce rythme, il faudra 3936 jours pour retrouver tous les artistes listés, ce qui nous mène en 2019.
La situation en France
En France, les sociétés de gestion collectives ont elles aussi leurs sommes « irrépartissables » qui finissent par être réaffectées, théoriquement au bout de 10 ans, à des actions dites « culturelles ». La plus célèbre d’entre elles, la Sacem, ne joue pas la transparence comme SoundExchange, mais propose uniquement à ses adhérents un moteur de recherche qui ne permet pas de consulter l’ensemble de la liste, alors qu’elle surpasse très certainement largement celle de SoundExchange.
En 2006, derrière année connue, les sociétés de gestion collective en France ont utilisé pour financer leurs actions « culturelles » (dont la lutte contre le piratage) 18,4 millions d’euros issus directement des lignes d’irrépartissables de leurs livres comptables. Ce sont autant de sommes qui auraient dû aller, normalement, dans les poches des artistes au nom desquels la lutte contre le piratage est menée. Mais le ministère de la Culture, prompt à faire la chasse aux pirates, n’élève jamais la voix pour protester contre un niveau aussi élevé de sommes non réparties.
Plus il y a d’irrépartissables affectés aux actions culturelles, moins c’est au ministère de mettre lui-même la main à la poche pour financer ces actions…
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