Spécialisée dans le relevé des adresses IP de P2Pistes sur Internet et dans le sabotage des réseaux P2P par la diffusion de nombreux « fakes » destinés à décourager les utilisateurs, la société MediaDefender a le bec dans l’eau. Noyée sous les dettes qu’elle n’arrive pas à rembourser, la maison mère envisage désormais la faillite mais tente un dernier virage pour s’en sortir : collaborer avec les P2Pistes après les avoir chassés.

Que Advestigo et CoPeer-Right Agency se le disent, lutter contre les P2Pistes ne fait pas recette bien longtemps. Racheté 42,5 millions de dollars par ARTISTDirect en 2005, le spécialiste de la chasse aux pirates et de la pollution des réseaux P2P MediaDefender compte ses jours de survie avec angoisse. Déjà lynchée par la bourse, la société a indiqué à l’occasion de la publication de ses résultats trimestriels pour le premier trimestre de l’année 2007 que « le chiffre d’affaires lié aux activités anti-piratage de MediaDefender a baissé en 2007 par rapport à 2006, et la direction anticipe une baisse plus importante en 2008« .

La société a réalisé 2,89 millions de dollars de chiffre d’affaires au premier trimestre 2008, contre 3,84 millions pour la même période l’an dernier. Soit une baisse d’activité de 25 % en un an, et ça n’est qu’un début. Mais surtout, on découvre dans les documents soumis à l’autorité boursière que la société ARTISTDirect est criblée de dettes, et qu’elle n’arrive plus à surmonter ses dépenses. Mise au pied du mur par ses actionnaires, elle a engagé le 7 février dernier les services d’un cabinet de conseil financier pour trouver une issue, qui semble fatale.

« Si la société n’est pas capable de parvenir à une vente ou une fusion« , et si elle n’arrive pas à trouver une solution de compromis satisfaisante avec ses créanciers, « la société n’aura pas suffisamment de ressources financières pour maintenir ses activités« . « Dans un tel cas, la société aura peut-être besoin de considérer une réorganisation ou une restructuration formelle ou informelle, y compris [une mise en liquidation judiciaire]« , peut-on lire dans les documents remis à la SEC.

Pour expliquer cette déroute, MediaDefender a trouvé un coupable tout désigné : ses clientes les majors. « La principale source de cette baisse de chiffre d’affaires est due à la réduction des dépenses de la part des grandes maisons de disques à cause d’une réduction importante de leurs ventes et de leur rentabilité« , explique la société à ses actionnaires. Il faut apprécier l’ironie. Alors que les maisons de disques employaient justement ses services pour relancer ses ventes ou à tout le moins freiner leur chute, MediaDefender prétend que c’est à cause de la baisse des ventes que les labels n’emploient plus ses services. L’oeuf ou la poule. Au moins, ça en dit beaucoup sur la confiance que placent désormais les majors dans les solutions de lutte contre le piratage.

On apprend ainsi qu’en 2007, 68 % des revenus de MediaDefender provenaient de seulement 4 clients (les quatre majors : Universal, EMI, Sony BMG et Warner). Or ils commencent à déserter. En janvier 2008, l’un des clients qui pesait à lui-seul pour 12 % de l’activité de MediaDefender a décidé d’arrêter de faire appel à ses services. Les autres seront sans doute tentés de suivre, surtout après le fiasco des e-mails confidentiels volés, et plus récemment la bourde de MediaDefender, qui a lancé une attaque DDOS contre un site parfaitement légal.

Dans un ultime espoir, ARTISTDirect indique que sa filiale MediaDefender se tourne désormais vers la publicité sur les réseaux P2P pour trouver une nouvelle source de revenus. Elle a commencé cette activité l’an dernier, ce qui lui a rapporté plus d’un demi million de dollars. Selon la maison mère, le chiffre d’affaires de la publicité dans les réseaux P2P pourrait combler cette année le déclin de son activité anti-piratage.

Preuve qu’il est beaucoup plus rentable de travailler avec les pirates que contre eux.

A bon entendeur.

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